Le site /
- Un recueil de nouvelles à l’honneur cette semaine, Des raisons de se plaindre, par le lauréat du prix Pulitzer 2003 Jeffrey Eugenides.
- L’échéance hautement symbolique du 130eme post de l’Instagram @130_livres approche à grands pas. Pour l’occasion, il y aura un concours. Oui, un concours. Comme font les bookstagrameurs qui y comprennent quelque chose. Tant d’audace me sidère moi-même. Je suis gonflé à bloc.
Les auteurs /
- Sans surprise cette fois, on continue avec l’Avent littéraire, et les sélections de cette semaine :
Jour 8 – Un auteur découvert cette année :
- L’indispensable Bernard Malamud, rencontré avec L’homme de Kiev. Profondeur, empathie, universalité. Ils sont très peu à toucher cette perfection-là.
Jour 9 – Le meilleur personnage :
- Doc Carroll, le manager du boxeur Eddie Brown en quête d’un titre de champion du monde dans Ce que cela coûte, de WC Heinz. Un sage. L’incarnation de la sublime exigence du noble art, qui excède de très loin ce qu’en imagine le béotien.
Jour 10 – Le livre le plus déstabilisant :
- Le manufacturier, de Mattias Köping. L’infinie brutalité de ce thriller confine presque à la complaisance. Le hic, c’est que le propos est très documenté. Ça se passe aujourd’hui, en France et ailleurs. Effrayant.
Jour 11 – Le livre le plus original :
- Le Cherokee, de Richard Morgiève. L’auteur part des codes les mieux connus du roman noir américain de l’Après Guerre, pour les accomoder d’une manière unique et toujours déroutante, dans la forme et sur le fond. L’exercice fascine.
Jour 12 – Le livre le plus instructif :
- L’arbre monde, de Richard Powers. Une somme sur l’écologie qui épate par sa densité et sa richesse, et sidère carrément lorsque l’on considère que l’auteur de ce Pulitzer 2019 ne connaissait pas grand-chose au règne végétal avant de l’écrire.
Jour 13 – Le livre le plus émouvant :
- Eureka Street, de Robert McLiam Wilson. Je le dis, le redis, le clame et le proclame : un bouquin qui fait pleurer de rire, de rage, de tristesse et de joie est un pur chef d’oeuvre.
Jour 14 – Le livre le plus drôle :
- Sérotonine, de Michel Houellebecq. Souvent attendu, parfois d’une douloureuse lucidité, Sérotonine est un livre foncièrement déprimant. Mais dont les 100 premières pages m’ont fait faire sous moi. Voilà.
Les puncheurs /
- Les Américains les appellent les « Cinderella stories », ces histoires où l’obscur challenger voir d’un coup sa citrouille se changer en carrosse et ses émoluments multipliés par 50. C’est précisément ce qui arriva à Andy Ruiz Jr. le 1er juin dernier au Madison Square Garden, par la grâce d’un fameux crochet gauche à la tempe du si parfait chouchou des médias anglais Anthony Joshua. Jamais en panne d’une bonne blague sur son addiction aux Snickers, l’aimable Ruiz, sa bouille ronde et son bide atypique à ce niveau de compétition firent souffler un vent de fraîcheur sur la catégorie reine. Il semblait avoir la tête sur les épaules, faute d’avoir connu la voie royale des boxeurs préparés pour l’élite. Inversement, s’agissant de la capacité de Joshua à rebondir à peine 6 mois après la catastrophe de New York, le doute était permis. Rares sont les « immediate rematches » où le vaincu venge un KO, voire les poids lourds capables de reconquérir un titre significatif. Tout le monde n’est pas Lennox Lewis ou Evander Holyfield. L’Anglais jouait la suite de sa carrière à quitte ou double. Il ne flancha pas.
- Dans une enceinte érigée en 40 jours à peine sur un site historique d’Arabie Saoudite, Ruiz et Joshua nous rappelèrent une autre vérité cardinale du noble art : pour la plupart des Cendrillons, la citrouille retrouve bien vite son aspect d’origine. Champion du monde, c’est un métier. Emerveillé par sa propulsion instantanée au rang de superstar – lui qui combattait encore pour 200000 dollars le 20 avril 2019 découvrit ainsi les joies des chèques à 7 et 9 millions -, Ruiz omit tout simplement de s’entraîner pour cette revanche. Il accomplit ainsi l’exploit de se présenter plus lourd de 15 livres qu’au combat de juin. Les qualités intrinsèques du Mexico-américain ne sont pas en cause : il sait boxer en combinaisons, il bénéficie d’une vitesse de bras remarquable pour la catégorie, et son menton est d’une rare robustesse. Reste que contre un Joshua affûté comme jamais, déterminé à ne pas reproduire ses erreurs et procédant aux bons ajustements tactiques, il n’y eut pas de match.
- Joshua exploita son allonge supérieure en jabs et 1-2, posa rarement ses appuis pour éviter de s’ouvrir aux contres adverses, et alterna les déplacements dans les deux sens, 12 rounds durant. Jusqu’à multiplier les accrochages quand la fatigue commença à lui peser, ce qui aurait pu lui valoir un anecdotique point de pénalité. Mais les faits sont têtus. Lent et incapable de couper la route de son adversaire, Ruiz subit le combat, du début à la fin. Autant le dire franchement : si elle fut une véritable démonstration, cette revanche manqua de sel. Nombreux sont les amateurs de belles histoires à en blâmer Joshua, soi-disant coupable d’avoir vaincu sans panache. Espérons qu’une telle amertume d’après-match se dissipera assez vite. Reprocher à un boxeur de procéder à des ajustements payants est un non-sens. Dans ce sport, l’adaptabilité est la marque des meilleurs. Et si son succès parut trop facile, il faut surtout le reprocher à un Andy Ruiz en profond décalage avec son nouveau statut supposé. Si champion du monde des lourds est un métier, 128 kg pour 1m88 constitue bien une faute professionnelle.
- De l’adaptabilité, il en faudra encore à Anthony Joshua pour vaincre un Deontay Wilder ou un Tyson Fury. Tous deux raffoleraient du duel de loin imposé par « AJ » à Ruiz. Fury, parce qu’il est imbattable dans l’escrime de poings, et Wilder parce que la distance est idéale pour déployer le baiser de la mort qu’est son interminable cross du droit. AJ ne partirait favori contre aucun des deux, mais il a pour lui sa faculté à s’ajuster. Parvenir à serrer de près ses deux rivaux est plus facile à dire qu’à faire ; cependant, ce serait sans doute la clé du succès. Quant à Ruiz, avant de prétendre à une belle contre AJ, il doit se demander posément ce qu’il attend encore de la boxe. Se retirer riche d’une fortune inespérée n’aurait rien d’infâmant. Pour poursuivre, il faudra prouver au monde – comme à lui-même – que la faim ne l’a pas quitté (…). C’est précisément ce que vient d’accomplir Anthony Joshua. En boxe, les histoires de rédemption sont aussi belles que celles des Cendrillons. Espérons qu’Andy Ruiz, lui aussi, en aura une jolie à nous raconter.
Bonjour Antoine,
J’ai adoré lire ce billet témoignant toujours d’une fine connaissance de la boxe. Avec la blague finale : « Ruiz doit prouver au monde qu’il a encore faim » euh.. pas trop quand même.
Amicalement Vincent
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Merci Vincent !
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