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On est en juin, et je ne frétille pas. Aucune allégresse particulière à l’approche du premier jour de l’été, et pour cause : ma fête de la musique n’aura pas lieu. Je ne parle pas du prévisible concours de djembés, pile sous mes fenêtres, le 21 au soir. Mais plutôt du Hellfest, le Noël ensoleillé des métalleux. Un an à y penser pour que dalle. La foire d’empoigne d’octobre, où l’on arrache son ticket à des légions d’autres furieux. Les révélations de l’affiche au compte-gouttes, que l’on commente à l’envi. Les dilemmes des chevauchements de concerts à trancher, les révisions fébriles quand on n’en sait rien. Les souvenirs qui remontent ; autant de moments glorieux ou minuscules qu’on veut revivre à l’identique, avec les potes. Rien de tout ça n’aura lieu. Quedchi. Nada.
Un Kennedy dirait : « Ne te laisse pas abattre. » J’abonde, et me shoote au casque. Des heures et des heures de gros son qui tabasse. De quoi se donner des envies de liste, ne serait-ce que pour soi, pour mettre un semblant d’ordre, être au clair dans ses choix. En parler, aussi, à défaut de pouvoir rapporter in extenso les péripéties de la nouvelle année au Royaume du Muscadet. Ceux qui ont suivi savent combien ça m’amuse. Merde, on me prive de ça aussi. Faut évacuer quelque chose, à gros bouillons. Tant mieux si ça en stimule certains. Alors oui, ce sera une liste. Des titres de rock velu, quoi. J’ai le temps : il y en aura 100.
100 morceaux de hard rock et de métal, au sens plus ou moins large, classés dans un ordre subjectif en diable. Du vieux, forcément, faut s’assumer. Et quitte à n’être d’accord qu’avec moi-même, autant tracer la ligne où je le veux. L’exemple qui tue : Led Zeppelin. Totalement légitimes dans l’absolu. Mais chez moi, c’est les Who, les Beatles et les Stones, que ces mecs-là regardaient dans les yeux. Rien d’infâmant, de fait. Simplement, dans ma tête, ce n’est pas ce monde-là. Et je ne les y compterai pas, voilà tout. Ceux qui n’ont pas encore claqué leur écran de rage peuvent consulter ce qui suit.
100 / Vengeance (The Pact), Fire of unknown origin, Blue Öyster Cult
Aux confins du rock progressif et du heavy metal, cette pure chanson d’ambiance s’accordera magnifiquement avec une solide dose de THC.
99 / Balls to the wall, Balls to the wall, Accept
Un prototype d’hymne de stade à la sincérité indiscutable, ce qui n’est certes pas le cas de son raffinement intrinsèque – cf. le titre de l’œuvre et la couverture du disque.
98 / Blind, KoЯn, KoЯn
Le premier titre du premier album éponyme de KoЯn, ou quand des mâles ouvertement béta s’approprient un genre musical de seigneurs de la jungle… et que ça fonctionne.
97 / Footsteps in the Distance, Atheist’s Cornea, Envy
Alternance d’un mur de son éclatant et d’une scansion rythmée – pour une fois, le chanteur de ce groupe de screamo japonais ne crie pas – d’où se dégage une belle et profonde mélancolie.
96 / Antisocial, Répression, Trust
Cocorico. S’il fait toujours secouer la tête dans toutes nos salles des fêtes de sous-préfectures, Antisocial reste avant tout fondé sur un putain de bon riff, et eut l’insigne honneur d’une reprise par un groupe majeur de thrashers américains – les Newyorkais d’Anthrax.
95 / The new order, The new order, Testament
On peut reprocher au Testament des débuts d’avoir agi en clone de Metallica. Encore faut-il l’avoir fait avec talent, et une virtuosité technique lorgnant du côté de Megadeth.
94 / Tornado of souls, Rust in peace, Megadeth
Megadeth, tiens donc. Plusieurs générations de boutonneux se sont abîmé les doigts à tenter de répliquer, sans succès, les subtils entrelacs de ferronnerie ouvragée de Rust in peace. Dont Tornado of souls, qui en recèle peut-être les plus insanes.
93 / Photograph, Pyromania, Def Leppard
Ou lorsque tu t’inclines devant LE titre parfait d’un groupe mythique de hair metal qui t’ennuie un peu, à part ça.
92 / Sharp dressed man, Eliminator, ZZ Top
Prodigieux, le clip dit tout de la chanson : une ode aux filles en lycra permanentées au-delà du raisonnable, aux caisses rutilantes et aux costards à épaules format pare-chocs. Du pur jus d’années 80.
91 / Shallow be thy game, One hot minute, Red Hot Chili Peppers
Quand un gratteux de metal alternatif torturé rejoint un groupe d’experts mondiaux en funk de plage, il en résulte une pépite incomprise de funk metal souverain intitulée One hot minute, et son brûlot anticlérical Shallow be thy game.
90 / Over the mountain, Diary of a madman, Ozzy Osbourne
Seconde et ultime collaboration d’Ozzy avec le regretté prodige Randy Rhoads, Diary of a madman s’ouvre sur cette bombe lourde et inquiétante, assaisonnée des glapissements maniaques à souhait du Prince of Darkness. Miam.
89 / Midlife crisis, Angel dust, Faith no more
On peut dire du chant de Mike Patton comme de l’ensemble étrange et composite que constitue Midlife crisis : c’est n’importe quoi, mais tellement bien fait.
88 / Gun, Louder than love, Soundgarden
Ceux qui envisagent – parfois à raison – le grunge comme un sous-genre de geignards mal lavés sont cordialement invités à se laisser porter par les accélérations et débrayages burnés de Gun.
87 / The gift of guilt, L’enfant sauvage, Gojira
Pour leurs zélateurs, la grande musique commence et s’arrête avec le death metal progressif des Bayonnais de Gojira. Les autres pourront apprécier l’ambition et la complexité de leurs meilleurs morceaux, servies par l’incroyable technique de Mario Duplantier à la batterie.
86 / How would I laugh tomorrow, How would I laugh tomorrow when I can’t even smile today, Suicidal Tendencies
Quasi éponyme de l’album au nom le plus agaçant de l’Histoire, How would I laugh tomorrow vous fera pousser un skateboard sous les baskets. C’est aussi une référence du crossover thrash, mélange de bon gros thrash et de méchant punk.
85 / No one like you, Blackout, Scorpions
Toute politique nataliste digne de ce nom s’appuie sur une bonne vieille ballade des Allemands de Scorpions en fond sonore. Si l’on s’est beaucoup fécondé sur Still loving you et Winds of change, No one like you présente une sucrosité moindre, pour un résultat tout aussi érogène.
84 / Du hast, Sehnsucht, Rammstein
On peut ne pas connaître grand-chose au rock industriel en général et aux pyrotechniciens grandguignolesques de Rammstein en particulier, tout en raffolant du plus entêtant de leurs tubes planétaires. Simple, mais d’une efficacité toute germanique.
83 / Judgement day, For unlawful carnal knowledge, Van Halen
Ode à l’inconséquence et titre le plus heavy d’un album (tout de même) intitulé F.U.C.K., Judgement day démarre sur un hard FM bon enfant avant que le riff principal ne dévoile ses amples biscotos bronzés et huilés de frais. Un bonheur régressif, aussi simple que contagieux.
82 / Overkill, Overkill, Motörhead
Cinq bonnes minutes d’un vacarme insupportable et délicieux.
81 / Stinkfist, Aenima, Tool
Maynard James Keenan est un dieu vivant du métal progressif doublé d’un sacré farceur. Prise au premier degré, l’ouverture d’Aenima évoque les pratiques qui firent la célébrité nationale de la Fistinière. Peut-être aussi au second, d’ailleurs, mais le résultat d’ensemble est unique.
80 / Wrathchild, Killers, Iron Maiden
Iron Maiden, c’est une basse galopante, et tout plein de bonnes choses autour. Parmi leurs tubes, Wrathchild en est l’illustration quintessencielle : les quatre cordes de Steve Harris portent le rythme ET la mélodie, et laissent les zolis arrangements aux autres.
79 / Young lust, Pump, Aerosmith
Il devient cocasse d’imaginer que les Rolling Stones américains d’Aerosmith confirmaient leur renaissance il y a plus de 30 ans avec Pump, dont l’ouverture est une merveille de blues rock sudiste d’un équilibre admirable, à laquelle on pardonne même de s’achever sur un solo de batterie.
78 / Eyes of a stranger, Operation : Mindcrime, Queensrÿche
En 1988, Queensrÿche sortait peut-être, avec Operation : Mindcrime, le plus grand concept album de l’histoire du métal, au point d’intimider un Bruce Dickinson pourtant auréolé du succès de Seventh Son of a Seventh Son. Son point d’orgue, le poignant et théâtral Eyes of a Stranger.
77 / Desperate cry, Arise, Sepultura
On flirte ici avec le metal extrême jusqu’à l’échange de fluides librement consenti, mais l’architecture imposante et savante de Desperate cry satisfera jusqu’aux oreilles de hardos plus délicats – à volume raisonnable, s’entend. Et mazette, quel travail aux fûts d’Igor Cavalera, et quel solo d’Andreas Kisser.
76 / Disciples of the watch, The New Order, Testament
Avec le temps, Testament a peu à peu lâché la bride à son penchant pour les constructions élaborées, autour des envolées majestueuses d’Alex Skolnick à la guitare solo. Reste que leurs thrashers bien compacts les plus réussis raviront petits et grands. Ainsi, le rustique et jouissif Disciples of the watch. Obey.
Beaucoup de bonnes choses dans ces titres (et de souvenirs !!). Pour ma part, je n’ai jamais pu aller au Hellfest parce que je suis agoraphobe, mais je comprends la frustration…
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Ce sera dantesque l’an prochain ! 🙂
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