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De la même façon que ce chef d’oeuvre de Stephen King alterne les récits de la vie d’une même bande de copains à 27 ans d’intervalle, Ça mérite largement d’être relu aujourd’hui par les jeunes ados des années 80. Pour ceux qui y auraient échappé tout ce temps-là : c’est un roman fleuve sur la peur elle-même, qui part de l’idée géniale que le monstre caché sous le lit des enfants existe bel et bien… et qu’il les mange vraiment.
Un prédateur parmi d’autres
Pour que les enjeux et la tension qui en résulte soient poussés à leur paroxysme, King s’attache à faire de toute la séquence de 1958, date du premier affrontement avec « Ça », une quête initiatique poignante unissant 7 amis dans le contexte à la fois terriblement banal et inhospitalier d’une ville moyenne du Maine, dont le monstre qui habite les égouts est loin d’être l’unique péril caché.
Derry regorge en effet de petites frappes sadiques à souhait, comme de parents indifférents, étouffants ou abusifs, et tous les drames qui jalonnent son histoire rappellent à quel point préjugés et bas instincts ne sont jamais loin de prendre le contrôle du monde des adultes. Comme le fait justement remarquer l’un des héros, l’entité aux mille visages qui les hante, dont l’incarnation favorite a dégoûté deux bonnes générations de lecteurs des clowns à l’ancienne, ne fait finalement qu’occuper le peu de place qui reste aux prédateurs non-humains.
Un King dont même la fin est admirable
L’épisode de 1985 donne lieu à une réflexion sur le poids des traumatismes de l’enfance dans la construction des individus, la résilience et la mémoire. On notera aussi que Ça propose l’un des épilogues les plus aboutis d’un auteur pas franchement réputé pour ses finitions.
Si ses passages malsains ou horrifiques sont du haut niveau attendu – le chapitre dédié à l’ineffable Patrick Hockstetter est un must absolu -, il s’impose parmi les tous meilleurs opus de Stephen King par la profondeur de ses personnages principaux et par le soin méticuleux porté à l’histoire, la géographie et la communauté si particulières de Derry.
1200 pages, certes. Mais c’est l’été. Demandez-donc un ballon à Grippe-Sous, le clown dansant : il meurt d’envie de voir comme vous avez grandi. Ou pas.