Le site /
- Il s’en sera fallu de peu, mais un nouvel article est bien en ligne depuis hier, côté boxe : la biographie de l’un des plus grands poissards de l’Histoire du noble art, le Cubain Luis « El Feo » Rodriguez. Avouez que la cadence de publication a singulièrement décollé, ces derniers temps.
- La chronique de l’indispensable Mes amis d’Emmanuel Bove semble partie pour un succès d’estime plutôt que populaire. Autrement dit : personne ne clique. C’est fâcheux. Cliquez donc.

Les auteurs /
- J’ai reçu cette semaine la lettre manuscrite d’un éditeur en remerciement d’un article paru dans le magazine pour lequel je pige. Ce monsieur œuvre dans une maison indépendante qui ne croule pas toujours sous les retombées presse ; le papier avait eu pour lui valeur de (petit) événement. Voilà qui tranche avec les relations souvent très transactionnelles entre chroniqueurs et services presse – je ne blâme personne, tout le monde ayant plus que de quoi s’occuper, et puis d’autres font déjà des efforts appréciables, en plus il m’arrive d’être moi-même assez sibyllin, ça y est, il est temps que j’arrête de mettre les formes, tout le monde a bien pigé à quel point je suis pétochard. Bref, j’étais presque ému, voilà tout.
- Nous sommes supposément en fin de pandémie, mais je constate autour de moi un phénomène d’addiction nouveau et préoccupant. Mon inquiétude a commencé voici quelques jours sur internet en prenant des nouvelles d’amis lecteurs, et s’est accentuée hier après-midi alors je passais chez mon libraire en vue d’y trouver une idée de cadeau. « Bonjour ! » me dit-il d’un ton plus enthousiaste qu’à son habitude. Et d’embrayer illico : « Vous avez vu ça ? », pointant du doigt une belle pile bien en évidence. Je lui réponds que oui, de l’air entendu du type qui suit un peu les nouveautés, après quoi je lui demandai – convaincu de la réponse – s’il avait lu et apprécié ce qu’il me désignait ainsi. « OUI » répondit-il, les yeux écarquillés au-dessus de son masque dévoilant des pupilles dilatées. Il poursuivit : « Je n’en peux déjà plus d’attendre la suite ! ». Seigneur. Pas ça, pas lui. Il est perdu. Une victime de plus de Blackwater, la dernière publication de Monsieur Toussaint Louverture. Le savoir-faire dudit dealer était déjà connu : de très bons textes que contiennent de bien beaux objets, créant une dépendance physique immédiate. Voilà qu’il ajoute un ingrédient supplémentaire à sa funeste préparation : le roman feuilleton, en l’occurrence la réédition d’une saga fantastico-familiale de Michael McDowell sortie en 1983, soit la perspective d’une dose supplémentaire toutes les deux semaines au prix d’un poche. Le crack littéraire vient d’être inventé, et il nous appartient à tous de dire « non ». Enfin il vous appartient, parce qu’en ce qui me concerne j’ai pris les deux premiers tomes pour moi et deux autres pour offrir.

- Louis-Ferdinand Céline, Georges Perec, Annie Ernaux : la mode est aux publications d’inédits posthumes. Oh, ça va, hein. Une pensée amicale à tous ceux qui s’infligeront des billets sur le Perec paru au Seuil, Lieux, dont on aura astucieusement ôté tout ou partie des « e ». S’agissant du Céline, le fait que soit diffusé le 5 mai prochain chez Gallimard un premier jet de l’auteur, ce que semble être Guerre, m’intrigue un peu : il avait la réputation de reprendre ses textes avec acharnement à chaque étape de leur préparation, manuscrit, tapuscrit, épreuves, etc. Les premiers avis sont certes enthousiastes – après quoi on pourra s’interroger sur la probabilité, voire la possibilité du contraire. Mais l’idée de le sortir en l’état aurait-elle bien convenu à l’auteur de Mort à crédit ? On ne saurait exclure qu’il s’en fiche un peu aujourd’hui.
- Dans le reste de l’actualité, s’il se félicite du succès de la première édition, le patron du Festival du livre de Paris espère « accueillir une plus grande diversité éditoriale » l’an prochain et projette pour cela de « reprendre très rapidement contact avec les régions ». Heureuse initiative compte tenu des absents. Je regrette un peu d’en avoir pris connaissance dans une interview où figuraient les dégoutants « pallier à » et « j’aimerai par contre ». Merci pour votre soutien, le collyre ne devrait pas tarder à agir.
Les puncheurs /
- Le Madison Square Garden accueillera cette nuit un authentique événement : sans doute le plus grand combat de l’Histoire, rien de moins. Expliquons-nous : on a tant galvaudé l’expression « combat du siècle » chez les messieurs qu’abuser des superlatifs vaut reconnaissance d’une montée en puissance de la boxe féminine, et l’affiche de ce soir est en effet prometteuse : l’invaincue Irlandaise Katie Taylor remet en jeu son titre unifié des poids légers face à la patronne des poids plumes, la Portoricaine Amanda Serrano. Quintuple championne du monde amateurs et médaillée olympique à Londres, Taylor domine ses adversaires par sa technique et son activité à défaut d’un punch conséquent. Bien qu’elle ait plus ou moins impressionné lors de ses dernières sorties, elle demeure l’une des premières vraies icônes de son sport. Gageons qu’Amanda Serrano s’efforcera de réduire la distance et imposer la bagarre pour faire parler sa puissance supérieure. En toile de fond de ce superfight se poursuit le questionnement sur le format actuel de la boxe féminine, en l’occurrence 10 rounds de 2 minutes pour le championnat de ce soir : beaucoup d’observateurs considèrent que Taylor s’imposera plus facilement sur des reprises courtes tandis que Serrano aurait l’avantage si le combat durait autant que chez les messieurs. Nul doute qu’une victoire de la championne par décision serrée raviverait les débats. À très haut niveau, la boxe féminine propose un spectacle de bien meilleure tenue qu’il y a encore quelques années. Espérons que la réunion de cette nuit, dont l’essentiel de l’intérêt reposera sur ce combat vedette, soit un succès : les filles pourraient bien y franchir un nouveau palier.

- Un mot sur DAZN, diffuseur de l’événement newyorkais : bravo à eux, comme au promoteur Matchroom boxing, de parier avec une telle conviction sur la boxe au féminin. Un pari très littéral, pourrait-on ajouter, alors que pour faire monter le buzz autour du combat Eddie Hearn a parié la bagatelle d’un million de dollars avec Jake Paul sur la victoire de Katie Taylor. Les mauvaises langues diront qu’il saura provoquer le bon alignement d’étoiles quelle que soit l’allure du combat… J’ajouterais que le public français est fondé à exiger un spectacle de bonne tenue, lui qui aura vu son abonnement mensuel passer de 1,99€ à 9,99€… Une augmentation était inévitable, mais rares sont les produits et services dont le prix augmente de 400% d’un coup – reste à savoir si la boxe est aussi essentielle que l’huile de tournesol.
- Côté Top Rank et ESPN, l’affiche de la nuit n’est pas moins alléchante, avec un combat d’unification des titres WBC et WBO des super-plumes entre deux boxeurs invaincus. Le gaucher Shakur Stevenson a tout d’un futur patron, comme il l’a démontré en arrêtant Jamal Herring après 10 rounds de jonglage en règle. Ce dont il manque aujourd’hui est un combat référence où il devrait arracher la victoire à la bagarre, soit précisément le type de guerre qu’Oscar Valdez souhaitera lui imposer. Sur le papier et vu l’historique de Stevenson, son avantage d’allonge et la qualité de son déplacement devraient l’inciter à tourner autour du Mexicain et empocher round après round à bonne distance, sans guère faire d’étincelles. Mais si Valdez peut décevoir contre des adversaires à sa main, il s’est toujours hissé à la hauteur des plus grands défis proposés. À supposer qu’une solution existe pour attirer Stevenson dans un pugilat, on peut imaginer que l’entraîneur de Valdez Eddie Reynoso l’aura explorée à fond. Ce sera tout l’un ou tout l’autre : soit ce combat équivaudra à un valium et un verre de lait chaud, soit il offrira un suspense assez jouissif. Si j’étais parieur, je miserais sur Stevenson tout en espérant voir Valdez couper le ring avec application et attendrir les flancs de son adversaire pour l’avoir face à lui dans les championship rounds.

- Cocorico ! Même si la justice eût exigé qu’on convertisse le résultat du premier Soro vs Madrimov en no contest, on savait à quoi s’attendre dans le monde merveilleux de la WBA. Reste que Michel Soro n’a pas tout perdu : il disputera une revanche sur terrain neutre, a priori le 9 juillet à Londres. Le Français n’aura certes pas rajeuni d’ici-là, mais il devrait se présenter sans l’épaisse couche de rouille de la fois dernière. Go Soro ! On y croit.