Punchlines du 2 juillet 2023

Le site (Antoine) /

  • Pas de Hellfest sans compte-rendu posté sur Gonzai.com, site de culture alternative où « seul le détail compte » auquel je dois mon accréditation média. Cette année, je me suis concentré sur les vieilles gloires du métal présentées en tête d’affiche, en tentant de répondre à la question suivante : que valent vraiment sur scène les métalleux à l’âge de la carte vermeil ?
KISS a 50 ans. Ses membres, un peu plus.
  • Si la demande populaire me submerge absolument, je n’exclus pas de compléter ce papier par le récit des autres concerts et péripéties vécues sur cette XVIe édition de la fête de l’enfer à Clisson, un peu comme les années précédentes. Soyez convaincants.
  • Et puis le fait est suffisamment rare pour qu’on le souligne ici, une conférence de rédaction a pu se tenir en direct cette semaine autour d’une bonne tasse de bubble tea. C’est ballot, on a parlé de tout sauf du site.
130livres.com, c’est aussi un pont jeté entre les générations.

Il est temps de rallumer la littérature (Antoine) /

  • Seconde visite à la librairie Le Divan du XVe arrondissement en bien peu de temps : on croira bientôt que je suis accro au Vouvray servi sur place lors des rencontres littéraires, ce qui n’est pas entièrement faux. Mais il faut surtout saluer le goût sûr du patron des lieux : après avoir célébré les 20 ans des éditions de L’Arbre Vengeur, il s’agissait mardi dernier d’accueillir les trois principales parties prenantes de DOA, rétablir le chaos, publié le 22 juin dernier : l’auteur de Pukhtu, Lykaia et Rétiaire(s), volontiers blagueur et tout de jean vêtu, la journaliste Élise Lépine du Point et de Mauvais Genres sur France Culture – François Angelier était du public présent – à qui l’on doit la série d’entretiens dont il est question dans cet opus, et Benjamin Fogel, fondateur des éditions Playlist Society, également connu pour ses romans d’anticipation et sa participation à Métal Hurlant. Le mérite de ce dernier, intervieweur pour l’occasion, fut d’éviter autant que possible les redondances avec les questions déjà posées dans le bouquin, un défi relevé en équilibrant les questions entre l’autrice et le romancier. Il est d’abord question de la genèse du projet. Tout part d’une bonne entente entre DOA et Élise Lépine, établie au fil d’interviews parfois festives à l’occasion de ses dernières publications. Jusque-là consacrée à des essais culturels et des entretiens avec des cinéastes, la collection Phase B de Playlist Society, dont elle connaît mieux que bien le patron, constituait le support adéquat pour un exercice plus global et profond. DOA approuva l’idée : « Je suis le nez dans le guidon la plupart du temps et je réfléchis peu sur l’ensemble de mon travail ; j’ai d’ailleurs l’impression de répéter souvent les mêmes choses mais cette perspective-là était intéressante. La levée de mon anonymat par une offensive concertée (sic) de Libération et Wikipedia a d’ailleurs permis d’évoquer mon parcours plus en détail… même si le Covid a failli tout ficher par terre. » Auteur et intervieweuse se sont vus plusieurs fois entre Paris et Bruxelles, actuelle ville de résidence de DOA, chacun cuisinant pour l’autre à l’occasion, puis quelques sessions par Zoom ont permis de boucler l’affaire. Fondé sur une réflexion plus approfondie que lors d’entretiens plus ponctuels, le travail a consisté à reprendre l’œuvre dans l’ordre chronologique. Sans guère de sujets tabous : « DOA est généreux dans ses réponses, il y a eu du off, comme c’est l’habitude. On a peu parlé spiritualité », concède Élise, « On a bien fait ! «  répond DOA. « J’avais mis des barrières, certaines ont sauté. Famille et vie personnelle ne présentaient pas d’intérêt. Mais aucune réponse ne m’a mis mal à l’aise. » Même à propos du sulfureux Lykaia, consacré au BDSM… « Tout le monde évite le sujet lors des rencontres en librairies ! Je l’aime bien, ce livre, et je l’assume. La morale de son accueil, c’est qu’on peut massacrer des personnages par dizaines, mais qu’on ne peut pas sortir une malheureuse cravache… » Ce livre devait sortir avant celui sur l’officier SS qui occupe actuellement DOA. Au delà de son sujet particulier il fut l’occasion de réfléchir sur le récit à la première personne, qui concerne un protagoniste sur deux de Lykaia.
DOA, Élise Lépine, Benjamin Fogel et tout plein de bouquins.
  • Au fil de la carrière de DOA, l’auteur a fait évoluer ses outils, comme lorsqu’il expérimenta le présent de narration lors pour L’honorable société, écrit à quatre mains avec Dominique Manotti. Selon Élise, le renouvellement continu des techniques de l’écrivain a rendu d’autant plus intéressant cet entretien au long cours. Le DOA préféré de l’autrice est le tome 2 de Pukhtu. « Ça devait être un seul bouquin, mais il était trop gros ! » précise l’auteur, tout en reconnaissant que l’articulation « prémices – dénouement » entre les deux tomes fonctionne bien. La journaliste conclut en affirmant avoir trouvé l’être sensible derrière le romancier porté sur le noir foncé. Elle rappelle une vérité cardinale du genre : quelle que soit la qualité des bouquins, on est parfois déçu en rencontrant l’écrivain… ce qui ne fut pas le cas ici. « On m’a tant vendu comme un méchant… » rappelle DOA, satisfait ou pas de cet état de fait. Si l’exercice devait être retenté, Élise Lépine choisirait Laura Kasischke, peut-être l’occasion d’un tour dans le Montana… resterait à régler la question des frais avec son éditeur et compagnon, attendu que le modèle économique des essais sur l’art demeure éminemment fragile, quel que soit l’enthousiasme des retombées presse. Dur métier. Vient le temps des questions-réponses avec la salle : un lecteur demande si DOA signera bientôt un scénario. Lui répond avoir soupé du milieu de l’audiovisuel. « Le cycle entamé avec Citoyens clandestins m’a mis sur la carte, mais cette industrie veut des gens sans colonne vertébrale qui font tout très vite en reprenant des recettes éprouvées. Et beaucoup de projets n’aboutissent pas. Je n’aime pas arrêter un enchaînement synopsis – bible – traitement – scénario. Bref, dorénavant je dissuade vite les gens de bosser avec moi ! » Un autre participant interroge sur le caractère immuable des plans sur lesquels DOA fonde son écriture et le risque d’aboutir à des impasses. « Quand je prépare un plan – j’ai évolué dans ma pratique – la documentation nourrit d’abord la fiction, puis l’exercice du plan résout peu à peu les problèmes de structure. Lorsque j’écris il n’y a donc pas d’impasses à proprement parler mais parfois de nouveaux embranchements qui se résolvent sans trop de difficultés. Il est arrivé qu’un personnage prenne plus d’importance que je l’imaginais. Je lui ai transposé pas mal de découvertes prévues dans l’intrigue sans remettre en cause le plan lui-même. Sa robustesse a évité les impasses. » L’amateur de SF et de fantasy qu’est DOA demeurera-t-il vériste jusqu’au bout ? « Tolkien m’a beaucoup marqué, beaucoup appris à force de relectures, je continue à découvrir des choses nouvelles à chaque fois que je m’y replonge. Moi qui utilise le réel comme fond de sauce, je consomme déjà une énergie folle. Du temps de Tolkien on était moins distrait, on bossait plus, l’ampleur son travail me fascine : il a inventé toute une mythologie, des cultures, on les découvre couche après couche, ça m’épate absolument. Mes deux premiers romans (NB : Les fous d’avril et La ligne de sang) sont les plus inventés que j’aie écrits. Je vais rester vériste, ce dont je me sens le plus capable et qui correspond à mes projets du moment . » J’ai dû m’éclipser sans reprendre de Vouvray, mais riche d’une info qui me fait frétiller : un autre auteur dont je suis fan revendiqué devrait faire l’objet d’un travail comparable… C’est confidentiel. Stay tuned.
  • Dans le reste de l’actualité, on rappellera assez bêtement que brûler les livres en général et les bibliothèques en particulier n’a jamais rien résolu des difficultés d’une démocratie.

Le cinéma est mort : la preuve, il bouge encore (Guillaume) /

  • Parlons cinéma, parlons… Intelligence Artificielle. Loin de nous l’idée de faire le forcing sur le sujet, mais force est de constater que le monde n’attend pas 130 livres.com pour remettre une pièce dans la machine à angoisses. Dernièrement, une rumeur a fait l’effet d’une bombe : les acteurs pourraient se joindre à la grève des scénaristes qui paralyse maintenant Hollywood depuis plusieurs mois et met l’industrie en péril pour quelques temps. La raison ? L’IA justement. Près de 1000 comédiens – dont une bonne part de têtes d’affiches – ont signé une lettre envoyée à la SAG-AFTRA (le principal syndicat des acteurs à Hollywood) pour réclamer un moratoire sur l’utilisation de l’intelligence artificielle, en plus d’une revalorisation des salaires. On vous en parlait la semaine dernière, mais Hollywood a pris l’habitude de scanner les visages et les corps des comédiens et comédiennes pendant les tournages. Les arguments avancés (notamment fournir de la matière aux techniciens des effets spéciaux) ne paraitraient pas aussi fallacieux si toutes ces données n’étaient pas stockées par les studios, qui jurent évidemment aux grands dieux ne pas avoir l’intention d’en faire un usage autre que celui du film concerné. On saura gré aux acteurs hollywoodiens, rôdés à la fourberie inhérente aux argentiers du système, de ne pas attendre d’entrer en zone de contact avec l’iceberg pour tirer la sonnette d’alarme.
  • Voilà le souci. Chaque acteur cède son droit à l’image lorsqu’il signe un contrat pour tourner dans un film : c’est la base. Mais comme l’indiquait Samuel L. Jackson, le diable se trouve dans les détails, notamment les mentions « à perpétuité » et « connu ou inconnu » qui apparaissent dans les contrats. Autrement dit, sans encadrement juridique digne de ce nom, rien ne protègerait les acteurs contre l’absence de scrupules des majors… qui n’auraient plus besoin des services d’un acteur justement, puisqu’ils posséderaient leur image. Ce n’est pas de la science-fiction : ça se passe maintenant et tout suite, et ça dure déjà depuis hier.
  • Souvenez-vous de Brandon Lee et Oliver Reed, morts avant le terme des prises de vues de The Crow et Gladiator, et remplacés par des images de synthèse pour les dernières scènes qu’ils n’avaient pu tourner. C’était en 1994 et 1999. Depuis, le visage de Paul Walker a été ajouté sur le corps de son frère pour remettre le tournage de Fast and Furious 7 à flots après l’accident de voiture qui lui a coûté la vie. Vous objecterez que nécessité fait loi, on ne peut pas blâmer l’industrie d’ouvrir la boite de Pandore numérique quand la Faucheuse rappelle l’être humain à sa matérialité éphémère. Vous avez parfaitement raison. Mais depuis Peter Cushing, qui a cassé en pipe en 1994, est revenu d’entre les morts pour quelques scènes de Star-Wars Rogue One. Quant à Harrison Ford, toujours en vie et toujours vaillant malgré ses 80 balais, des technologies similaires lui ont permis de retrouver son corps de quarantenaire pour le prologue du dernier Indiana Jones. Bref, c’était déjà demain hier, et même chez nous Thierry Ardisson persiste à enfoncer un peu plus les portes de l’indécence en invitant une Dalida d’Outre-Tombe numérique dans un diner mondain. Vous commencez à voir le schmilblick ?
  • Mais comme dirait le poète : « Let’s put it all in perspective », et mettons un peu de raison dans ce magma d’émotions contradictoires. Personne ici ne prétend que la tentation de tricher avec la mort au cinéma a émergé avec l’IA. À titre d’exemple, les producteurs du Jeu de la Mort ne disposaient pas de technologies numériques en 1978, mais ça ne les a pas empêchés de mettre des lunettes de soleil sur un sosie de Bruce Lee pour terminer le film après la disparition du Petit Dragon.
Avouez : c’est saisissant.
  • En outre, personne ici ne souhaite débrancher Skynet pour retourner s’éclairer à la bougie et chanter Kumbaya au clair de lune et en acoustique. D’abord parce que ça priverait l’humanité des livraisons hebdomadaires de 130 livres.com, ce qui constituerait un crime encore plus grave pour la postérité que l’incendie de la bibliothèque d’Alexandrie. Et surtout, ce serait s’enfermer dans le déni du fait déjà accompli : les IA sont là. Et qu’on le veuille ou non elles ne vont pas s’en aller, mais il pourrait même en sortir du bon, pour peu que l’on prenne le temps de répondre collectivement aux questions posées par leur présence.
  • Car finalement ce ne sont pas les IA le problème, mais nous. Nous, qui devons déterminer collectivement et ce que nous sommes, et ce que nous voulons vraiment.  Vivre dans un monde d’images où l’humain ne serait plus qu’une matière première, malléable et recyclable à merci après être passé dans la machine à scan ? Évoluer dans un univers où le signe devient son propre référent, où les questions liées à la perte, au vieillissement, à la mort, s’évanouissent dans le désert du réel théorisé par Jean Baudrillard ? En tous cas, certains ne demandent pas mieux dans les bureaux des majors hollywoodiennes. Un boulevard pour nous fourguer toujours plus de Star Wars 15 ou d’Indiana Jones 26, mis en scène « à la manière de » George Lucas et Steven Spielberg par une IA qui dirigera les doublures numériques d’Harrison Ford et Mark Hamill qui retrouveront leurs 20 ans à l’image. Un vrai rêve de costards-cravates : plus de créations ni de créateurs, que des propriétés intellectuelles qui fonctionneront à coups de prompts élaborés sur des études de marché. Bref, Ready Player One : du « c’était mieux avant » en intraveineuse dans le monde de demain. Mais bon, ça n’a pas l’air encore pour tout de suite. À en juger par les chiffres du box-office estival – l’autre grande marotte de cette rubrique –, il y a une envie d’autre chose qui s’exprime assez nettement dans le rejet du modèle de blockbuster franchisé qui prévalait dans les années 2010. Quoi ? Personne ne le sait. Mais gageons que la réponse ne viendra pas d’une IA.
  • Pour conclure sur ce point, notons que l’excellent journaliste Julien Dupuy consacre un dossier en plusieurs parties consacré au sujet dans le magasine Trois Couleurs. Le premier numéro est sorti, et l’édito est consultable en ligne. C’est construit, pondéré, dense, rigoureux et étayé, bref tout ce à quoi nous a habitué le bonhomme depuis ses débuts dans le Mad Movies de la grande époque (les anciens se souviendront). Donc indispensable.
  • Pour embrayer sur une note plus guillerette, (re)parlons de Tom Cruise, l’irréductible humain qui n’a pas besoin de personne et encore moins d’une IA pour ne pas vieillir. Son Mission Impossible : Dead Reckoning s’apprête à sortir dans les salles françaises, et d’après les premières estimations devrait réussir sans trop de peine à fédérer les spectateurs. Une bonne nouvelle pour un film d’une ambition assez folle dont nous vous reparlerons évidemment en temps voulu.
  • Du coup, Tom a enterré la hache de guerre avec Universal, qui avait booké à son seul bénéfice les écrans Imax dont son MI aurait bien profité pour se feindre de plusieurs tweets appelant les gens à se rendre dans les salles pour d’autres blockbusters que le sien. L’acteur s’est fait prendre en photo avec le réalisateur Christopher McQuarrie devant les affiches d’Indiana Jones : Le cadran de la destinée, Barbie et Oppenheimer, tickets à la main, et petits mots d’encouragements inclus. Son « Tous au cinéma pour tous les films » (bon ok, surtout les américains qui coûtent chers) est devenu viral en moins de temps qu’il n’en faut pour le retweeter, et a même conduit Margot Robbie et Greta Gerwig, respectivement star et réalisatrice de Barbie, à lui emboiter le pas. Le plus grand défaut de Tom Cruise ? Qu’il n’y en ait qu’un.
Derrière le soleil, le rose.

Ce qui reste de la boxe anglaise (Antoine) /

  • Coup de théâtre dans l’affaire « Canelo Alvarez signe chez PBC » : le rouquin n’affrontera pas Jermall Charlo en septembre prochain, comme prévu initialement, mais son jumeau Jermell. Il s’agira donc d’un duel de champions du monde incontestés aujourd’hui séparés par deux catégories de poids. La bonne nouvelle, c’est que le gros chèque ira au plus méritant des deux frangins. La mauvaise, c’est qu' »Iron Man » Charlo risque de manquer d’arguments pour faire plier le Mexicain malgré une taille et une allonge supérieures. On a pu vérifier à maintes reprises la qualité du menton d’Alvarez à 160, 168 et 175 livres, après quoi il semble difficile d’imaginer un super welter le faire vaciller pour de bon. La chance de Charlo sera d’emporter une décision ; contre Canelo, apprécié du boxing business et maîtrisant les coups puissants et bruyants qui impressionnent les juges, la tâche sera des plus ardues. Charlo a montré lors de sa victoire sur Brian Castano une intéressante faculté à contrer les droites adverses données en fin d’enchaînement par un crochet gauche précis. Cette arme-là pourrait lui rapporter des points… si la puissance de Canelo ne le dissuade pas de prendre des risques. Reste à voir les effets de la prise de poids sur Jermell, soit l’incidence sur sa caisse, sa puissance et sa mobilité, en plus de la manière dont il saura gérer une inactivité prolongée – il n’a pas boxé depuis mai 2022. Le défi semble très copieux. En gardant bien dans un coin de la tête, comme le fait sans doute le camp Charlo, que Canelo n’a pas impressionné depuis longtemps… Tim Tszyu se consolera sans doute de l’indisponibilité de Charlo en combattant prochainement pour la ceinture dont la WBO devrait bientôt délester l’Américain.
  • C’était hier soir la 15eme sortie professionnelle du prospect américain Jared Anderson, qui enregistra pour l’occasion son premier succès par décision chez les lourds face à son compatriote Charles Martin à Toledo, Ohio. La taille et le dynamisme d’Anderson rappellent un peu l’ancien champion WBA Bruce Seldon ; hélas pour lui il en va de même pour sa défense. Alors qu’il maîtrisait son sujet et avait enregistré un knockdown au 3e round, il fut cueilli très proprement du bras arrière par le gaucher Martin et passa une pleine minute de la 5e reprise à assurer sa survie. S’il emporta 9 rounds sur 10, Anderson n’a visiblement pas le punch hors normes d’un Deontay Wilder voire d’un Anthony Joshua, et sa porosité défensive actuelle le mettra en danger permanent lorsqu’il affrontera des adversaires de ce calibre. « Big Baby » n’a que 23 ans : on ne saurait trop recommander à son entourage de prendre son temps avant de l’opposer à l’élite de sa catégorie. Le gamin a des qualités, en particulier sa palette offensive et sa faculté à enchaîner les combos, qu’il serait dommage de gâcher avec une sortie de route précoce. À noter en sous-carte les succès d’Arslanbek Makhmudov dans un duel de super lourds au niveau technique évoquant une bagarre de pub et du prospect américain gaucher Abdullah Mason, possible futur crack chez les welters.
Disclaimer : le sac de frappe s’est (un peu) rebiffé.
  • À propos de poids welters, les connaisseurs auront coché la date de samedi prochain pour un très probable régal sur le ring de l’AT&T Center de San Antonio : le champion WBA « régulier » Eimantas Stanionis affrontera enfin Virgil Ortiz Jr après deux reports pour raisons de santé. Il sera question de « ring generalship » entre un Stanionis habitué à imposer une pression d’enfer à ses adversaires et un Ortiz qui a besoin d’espace pour préparer ses coups puissants à mi-distance – dont un mortel crochet gauche au corps. Celui des deux invaincus qui saura imposer sa distance aura toutes les chances de l’emporter.
  • Welters toujours : c’est aussi le 8 juillet que l’épouvantail Jaron Ennis, champion IBF par intérim, affrontera le Colombien Roiman Villa à Atlantic City. En janvier dernier Ennis avait dû composer avec le style très élusif de l’Ukrainien Karen Chukhadzhian, ne s’imposant que par décision alors qu’il restait sur presque 20 KOs de rang. Magie d’un matchmaking maîtrisé : on lui oppose cette fois un Villa qui ne connaît que la marche avant et bouge très rarement la tête. Il ne faudra pas cligner des yeux devant ce feu d’artifice annoncé sous peine de louper le bouquet final…
  • La revanche immédiate demandée par Joe Joyce contre Zhilei Zhang aura lieu le 23 septembre prochain à la Wembley Arena. Un « quitte ou double » courageux de la part de l’Anglais, surpris en avril dernier par la précision de la gauche du Chinois. Quel que soit le vainqueur, il aura mérité la chance mondiale qu’on tardera encore longtemps à lui accorder… La boxe, quoi.

Le MMA bien va bien, merci pour lui (Guillaume) /

  • Parlons MMA, et parlons de la chute de Conor McGregor. Le sport, et notamment l’UFC sait ce qu’ils doivent à l’irlandais, qui a largement contribué par sa popularité à les démocratiser à très grande échelle. Mais depuis ses deux défaites contre Dustin Poirier, rien ne va plus pour le Notorious, qui s’enfonce pas très lentement mais très surement dans une déchéance publique proportionnelle à ses accomplissements. Rien que ces trois dernières semaines, McGregor a envoyé la mascotte d’une équipe de basket à l’hôpital, se fait accuser d’agression sexuelle, et les audiences de The Ultimate Fighter, l’émission de télé-réalité de l’UFC, touchent le fond malgré sa participation en tant que coach. Un mal pour un bien : son équipe n’a pas encore gagné un seul combat, et son état de forme commence à soulever des critiques chez ses fans les plus invétérés. Le McGregor d’aujourd’hui ressemble de plus en plus au Jake La Motta + 30 kilos de Robert de Niro dans Raging Bull. Et s’il s’avère que sa décôte subit à l’argus des Celebrity Fights est plus importante qu’observée, l’ancien double-champ pourrait bien faire ce que plus personne n’attend : remonter dans la cage pour se refaire la pastille avec un gros money fight. Ce qui, au vu de ses récentes sorties, pourrait constituer un non-événement en puissance, et un motif supplémentaire pour ternir un héritage déjà mal en point.
  • L’UFC de ce week-end fut l’occasion de pousser un cocorico salvateur. Après un début d’année peu clément avec le pugilat octogonale tricolore sur la scène internationale, Benoit Saint-Denis est passé pour inverser le sens du vent face à Ismael Bonfim, prospect brésilien ultra-dangereux. La prudence était de mise, et même chez les observateurs les plus prompts à déraisonner lorsqu’il s’agit de soutenir les combattants français à l’étranger. Mais il a fallu moins d’un round au « God of War » pour renverser les pronostics des dieux du MMA. Middle de gaucher bucheron pour annihiler le flanc de son adversaire debout, amenée au sol pour lui fermer les issues, et guillotine sur la mâchoire pour faire taper avant rupture des mandibules à une dizaine de secondes du finish. Avec cette performance, Saint-Denis vient de gagner son ticket d’entrée dans la file d’attente des premiers rôles. L’élève de Daniel Woirin ne recule devant rien et surtout pas devant la difficulté, son style a tout d’un crowd pleaser en puissance, et son histoire d’ancien des forces spéciales constitue un bonheur de storytelling. Bref, vivement l’UFC Paris.
« Douchement, mes genchivaos ! »
  • Séquence « Antoine passe une tête » : le hasard a voulu que je sois devant mon poste pile au moment où le Français entrait dans la cage de l’UFC Vegas sur un très opportun Seine Saint-Denis style. Même performants, les Frenchies de l’UFC ont du mal à se défaire d’une étiquette de « soft » aux yeux de fans américains toujours biberonnés à l’état du monde en 1945, soit pas vraiment la meilleure période tricolore de l’Histoire. La défaite sommaire de Cyril Gane face à Jon Jones n’a rien arrangé à l’affaire. Même si Benoît Saint-Denis n’a pas encore intégré le top 10 des poids légers, son CV a de quoi faire évoluer la perception des Français sur le principal marché du MMA planétaire : ancien para décoré au Sahel, performant malgré des débuts tardifs dans la discipline (à 21 ans), connu pour finir – rapidement – la plupart de ses adversaires, dont un Ismael Bonfim nettement favori et invaincu depuis 2014 envoyé au lit sans dîner, et ultra valeureux sous la mitraille lorsqu’il subit son unique défaite en professionnels des mains d’un adversaire dopé jusqu’aux yeux. Le gros tatouage en forme de croix sur le pectoral gauche est un plus pour certains. Bref, qu’il intègre ou pas le gratin de la discipline dans la foulée d’un Gane, à en juger par les commentaires US depuis hier soir Saint-Denis a déjà gagné un respect assez inédit par chez nous. Et puis j’ai jubilé devant ma télé comme rarement ces derniers temps devant tout combat impliquant un Français. Un point pour le MMA, accordé de très bonne grâce.

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