Punchlines du 12 février 2023

Le site /

  • Pas de nouveau papier cette semaine. Vous en eûtes deux celle d’avant, non ?
  • Margaret Atwood a exprimé ainsi ses doutes quant à l’intérêt de rencontrer un auteur dont on a aimé les romans : « C’est comme demander à parler au canard dont a apprécié le foie gras ». L’autrice de La servante écarlate a certes bien des mérites, mais cette semaine encore j’ai pu m’assurer du contraire s’agissant de rencontrer ses estimés collègues.
Vivent les rencontres au sommet !

Les auteurs /

  • En ces temps d’actualité molle – je ne reviendrai pas sur les derniers développements des aventures de Michel Houellebecq chez Alban Ceray et Rocco Siffredi – j’ai décidé de me replonger dans de vieux cartons rapatriés de chez mes parents qui fleurent bon le renfermé et les après-midi sans (trop d’) écrans d’antan, histoire de partager quelques souvenirs constitutifs du lecteur que je suis devenu. Voici donc une première fournée de vieux bouquins tout cornés ; je ne m’interdis pas d’en publier d’autres.
    • Kernok le pirate, Eugène Sue : Possiblement le roman le plus trash jamais publié chez Folio junior, ce qui explique mon attachement indéfectible à cette histoire de flibustiers amorale comme il faut. Sur mer, Kernok et ses hommes pratiquent sans retenue abordages, orgies et exécutions sommaires de rivaux anglais et espagnols. Rangé des voiliers, le bougre meurt en notable respecté dont on prononce un éloge funèbre délicieusement à côté de la plaque. Une merveille d’humour noir portée par la plume alerte d’Eugène Sue, qui compta Balzac parmi ses inconditionnels, et fort bien illustrée de surcroît.
    • Paris brûle-t-il ?, Dominique Lapierre et Larry Collins : Mon exemplaire n’était déjà plus vaillant quand je le dévorai au cours l’été 1987, attiré par la renommée de Dominique Lapierre et Larry Collins – ma grande soeur était fan de La cité de la joie – et ma fascination pour la Seconde Guerre Mondiale. Les 700 pages d’un travail d’historien(s) très documenté filent d’autant vite que le suspense est savamment entretenu, quand bien même la fin s’avère aussi divulgâchée que possible. Le souvenir des gamins recrutés par un faux officier des FFL pour être fusillés la veille de la libération de Paris m’a hanté un temps certain.
    • Contes de la bécasse, Guy de Maupassant : Un bouquin synonyme de souffrance puisqu’il appartient à la série honteuse de textes avalés à l’arrache juste avant la date de remise de leur fiche de lecture ; en l’espèce j’étais en quatrième et mon professeur de français au nom puissamment évocateur, M.Hache, était aussi compétent que pointilleux sur la discipline. Je n’aurai donc pas savouré ces dix-sept histoires de chasse dans les meilleures conditions. On y retrouve pourtant le charme du réalisme de terroir pour lequel l’auteur de Bel-ami est si fameux, et un ou deux passages qui firent glousser l’ado à voix sinusoïdale que j’étais.
    • Marcellin Caillou, Sempé : Le petit Nicolas a beau ne pas être grand, il fait pas mal d’ombre à son cousin Marcellin et c’est injuste, car l’histoire de ce dernier est à mettre entre toutes les mains encore un peu potelées (ou pas). Le malheureux rougit tout le temps, pour un oui ou pour un non, ce qui lui empoisonne autant l’existence qu’on peut l’imaginer. Jusqu’au jour où Marcellin Caillou rencontre René Rateau, qui lui éternue tout le temps, pour un oui ou pour un nom, et ne mène pas une existence beaucoup plus simple. Ils deviennent copains. C’est Sempé, donc c’est bien.
    • Le pantalon, Alain Scoff : Ledit pantalon est souillé de merde et de sang, manifestement prélevé sur un cadavre à peine froid, or on intime au soldat Lucien Bersot de s’en vêtir. Il refuse, ce qui lui coûtera : nous sommes en 1915 et l’état-major français cherche à faire des exemples pour donner à réfléchir aux (nombreux) mutins potentiels que compte l’armée. Le malheureux finira passé par les armes, ce qui interpelle d’autant plus le lecteur que son histoire est authentique. J’étais en classe de seconde lorqu’on me fit lire Le pantalon, dont l’auteur Alain Scoff est plus connu pour avoir été l’un des complices de Stéphane Collaro dans ses émissions du dimanche soir d’un raffinement approximatif (il interprétait entre autres le brigadier neuneu Ménardeau), fut une lecture obligée de mon année de seconde. Le souvenir que j’en conserve est d’autant meilleur qu’il fit pas mal bisquer mon paternel, inconditionnel de la Grande Muette.
    • Une difficile amitié, Marylin Sachs : Je n’ai pas retenu la façon dont cet obscur Castor poche m’est tombé sous la main. En revanche, je me rappelle avoir lu jusqu’au bout les aventures de Peter, gamin juif newyorkais dont l’amitié avec une grande gigue goy nommée Veronica qui partage son goût pour le patin à roulettes l’amène à se fâcher avec pas mal de ses proches. Deux souvenirs me reviennent quelques décennies plus tard : d’une, j’ai appris dans ce livre ce qu’est un knish, et de deux j’espérais qu’ils finissent par choper, étant moi-même à l’époque ce que des camarades plus dégourdis appelaient un « puceau de la langue », et en fait non. Pfff.

Les puncheurs /

  • Une poule devant un couteau : telle est l’image qu’évoqua le champion WBC mexicain des super-plumes Rey Vargas pendant les 12 rounds l’opposant à l’Américain O’Shaquie Foster. À l’Alamodome de San Antonio, l’ex-taulard établi à Houston jouait presque à domicile. Il donna à Vargas une leçon de technique à base de feintes et de maîtrise de la distance et du timing. En l’absence à ses côtés de l’entraîneur Nacho Beristein, Vargas ne trouva aucune réponse tactique digne de ce nom, et sa puissance limitée à 130 livres ne lui permet guère d’espérer abréger les débats. Il concéda largement une décision unanime. Dans une Amérique friande de rédemptions, l’histoire de Foster pourrait lui assurer une certaine popularité. Reste pour lui à confirmer au plus haut niveau.
  • Ceux d’entre vous qui sont tentés par le biopic à venir de George Foreman et pas encore lassés de ma binette peuvent aussi regarder cette vidéo de réaction à la bande-annonce du film postée chez le Cap’tain Crochet. Spoiler : on attend du (très) convenu, mais toute occasion d’évoquer le plus vieux des champions du monde des poids lourds est bonne à prendre.
  • Molle côté bouquins, l’actualité n’est guère plus excitante sur les rings en attendant Woods vs Lara le 18 février et Matias vs Ponce une semaine plus tard. Voilà qui justifie un autre voyage dans le temps. Il y a 40 ans, les 14000 fans présents au DCU Center de Worcester (Massachusetts) virent peut-être la meilleure version de Marvelous Marvin Hagler triompher en 6 rounds de son challenger anglais Tony Sibson. Un dur au mal, ce Sibson, qui rendit son titre européen des moyens pour se préparer dans les meilleures conditions. Il avait dansé 15 rounds avec Kevin Finnegan, autre victime du divin chauve qui lui avait rendu un hommage  inhabituel, et battrait plus tard Louis Acariès à Paris. Mieux, son crochet gauche faisait merveille contre les fausses gardes. Hagler était champion WBA-WBC depuis  1980 et son succès londonien sur Alan Minter, compatriote de Sibson, expédié en 3 reprises. Le gaucher avait goûté aux embrouilles du boxing business et s’employait à finir chaque adversaire pour rester maître de son destin. Il était invaincu sur ses 30 derniers combats. Ce soir-là, Marvelous fut parfait, jamais plus Hagler qu’en démantelant un courageux Sibson, gêné par une coquille baladeuse et – surtout – par un adversaire précis, puissant et mobile comme personne à ce poids. Plus d’une livre sous la limite des moyens, Hagler était affûté comme une lame. À son pic de performance, il n’était pas le destructeur entrevu contre Hearns mais la quintessence du « boxer-puncher » aussi impitoyable que difficile à cadrer. Un pugiliste merveilleux.
Le short rouge a dérouillé

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