Punchlines du 12 mai 2025

Le site (Antoine) /

  • Eu égard à l’épaisseur du cahier « boxe » de la présente édition, la partie « livres » est repoussée à la fois prochaine. Parce que c’est le même type qui écrit les deux, vous suivez ?
  • En revanche et pour concilier malgré tout boxe anglaise et littérature – l’un des objectifs avoués du présent site depuis sa création -, voici une vidéo de Frédéric Roux, connu des lecteurs réguliers de 130livres.com, expliquant la lente genèse de sa non-biographie de Muhammad Ali intitulée Alias Ali, déja chroniquée dans ces pages. C’était au temps où Fayard était Fayard, et ça reste un bouquin à lire absolument (chez Folio).
  • Et puis vu qu’on est d’humeur résolument belliciste, les films font eux aussi une pause cette fois-ci, mais je gage que l’ami Guillaume aura plein de belles et bonnes choses à nous raconter une fois rentré de Cannes, où il passe la semaine sans que la coïncidence avec le festival soit tout à fait fortuite…

Il est temps de rallumer la littérature (Antoine) /

  • Si vous avez suivi, on joue relâche.
  • Enfin je vous accorde quand même un scoop : je suis à ça de finir un bouquin remarquable entamé en septembre dernier, et dont vous devriez lire la chronique un jour prochain. Au rythme actuel de mes recensions, voilà qui méritait d’être signalé. Merci de votre attention.

Le cinéma est mort, la preuve : il bouge encore (Guillaume) /

  • Si vous avez suivi, etc.

Ce qui reste de la boxe anglaise (Antoine) /

  • Dans la foulée d’un Cinco de Mayo aux allures de buffet à volonté frelaté, le week-end dernier offrit à l’amateur de boxe des affiches un poil moins ronflantes, mais dont le mérite premier fut de tenir leurs promesses. En commençant par Anthony Cacace vs Leigh Wood, nouvelle étape d’une sorte de tournée des vielles gloires britanniques entamée par le Nord-Irlandais Cacace face à Joe Cordina en mai 2024 et poursuivie contre Josh Warrington en sous-carte de Joshua vs Dubois. Pour le valeureux Leigh Wood, même dopé par son public de Nottingham, le résultat fut comparable : toujours superbement préparé, un Cacace jouissant d’un avantage de taille et d’allonge à 130 livres a patiemment travaillé en parades et remises efficaces avant de porter l’estocade en deux temps au 9e round. Au moins le valeureux Wood partit-il sur son bouclier, c’est à dire sauvé par son coin alors que « The Apache » semblait parti pour le renvoyer au tapis. On comprend pourquoi le gaucher Anthony Cacace, lui-même plus un perdreau de l’année à 36 ans, a préféré abandonner sa ceinture IBF pour signer de lucratifs combats à sa portée devant des publics enthousiastes et connaisseurs.
Pour Cacace, l’heure de la cucurée.
  • 36 ans, c’est aussi l’âge de la star japonaise des super mouche Kazuto Ioka, qui espérait reconquérir samedi le titre WBA cédé par décision unanime à l’Argentin Fernando Martinez en juillet dernier. Las, celui qui maquille ses tatouages sur le ring pour ne pas choquer ses compatriotes ne put infléchir le choix des juges à l’issue de 12 nouveaux rounds d’excellente tenue. Faute de tenir le rythme imposé par le champion, il laissa « Pumita » Martinez faire quasiment carton loin en première moitié de combat, se concentrant sur d’efficaces contres en crochet gauche et un travail au corps précis. Ioka fut tout proche d’en toucher les dividendes lorsqu’un Martinez émoussé subit un knockdown au 10e round sur une nouvelle paire de crochets gauche, mais faute de pouvoir conclure le Japonais fut une nouvelle fois déclaré vaincu – le 110-117 de Robert Hoyle semblant aussi inutilement sévère que le 108-120 d’Edward Hernandez qui sanctionna la première confrontation. À l’annonce de cette quatrième défaite en carrière, les larmes de Kazuto Ioka laissèrent imaginer que l’intéressé ne tarderait pas à raccrocher les gants après avoir remporté des titres mondiaux dans quatre catégories de poids et vaincu une palanquée d’adversaires de renom (Donnie Nietes, Juan Carlos Reveco, McWilliams Arroyo, Kosei Tanaka, Joshua Franco, etc.), cimentant ainsi sa place au Hall of Fame. Martinez, lui, semble en pleine possession de ses moyens à 33 ans et capable de donner un excellent combat d’unification à Jesse « Bam » Rodriguez. Vivement.
  • Pas de gros week-end de boxe sans controverse : on dut celle de samedi au champion WBO des 130 livres Emmanuel Navarrete, toujours brillantissime dans son registre inclassable de « Drunken Master » – angles et timing atypiques, changements de garde, etc. – mais sans doute indûment protégé par l’arbitre lorsque ce dernier mit un terme au combat après 8 rounds, arguant d’un choc de tête supposément à l’origine d’une coupure à l’arcade gauche du champion. D’une part, d’aucuns ont survécu à des blessures autrement plus spectaculaires, la cicatrice barrant le front de Badou Jack depuis ses 12 rounds contre Marcus Browne peut l’attester, et d’autre part ESPN multiplia les ralentis prouvant que c’est bien un coup de Charly Suarez qui causa le saignement. Battu sur décision technique car mené au moment de l’arrêt, le très courageux et discipliné Philippin pouvait espérer mieux d’une fin de combat à haut risque pour son adversaire. Une revanche s’impose, et le « Vaquero » Navarrete n’a pas la réputation d’un planqué.
Ça a saigné.
  • Une revanche, c’est ce qui pourrait logiquement suivre l’affrontement de samedi à Malabo (Guinée Équatoriale) entre Souleymane Cissokho et Egidijus Kavaliauskas. La demi-finale WBC des poids welter a singulièrement perdu de sa saveur, en tout cas à court terme, depuis l’annonce de l’improbable Mario Barrios vs Manny Pacquiao prévu pour le 19 juillet prochain. Entre un Français inactif depuis novembre 2023 et un Lithuanien à la carrière en pointillés depuis son revers contre Vergil Ortiz à l’été 2021, l’affiche sentait déjà un peu la poussière compte tenu de son supposé standing. On savait le capitaine de la « Team Solide » de Rio redescendu à moins de 147 livres compte tenu de moyens physiques limités pour les super welters, et depuis ses deux voyages au tapis précoces contre Kavaliauskas on sait hélas que des questions subsistent à l’étage du dessous. En témoignent côté menton les deux voyages au tapis subis aux 2e et 5e rounds, et question punch le peu de dégâts en 12 reprises infligés à un Lithuanien mobile comme un plot anti-stationnement. Il faut malgré tout rendre grâce à Cissokho pour son attitude, car tenir la distance contre un finisseur de la trempe de « Mean Machine » avec un menton friable suppose du sang froid et des gonades, en plus de la caisse requise pour bouger sans cesse 36 minutes durant.
  • Après quoi on doit accepter le caractère profondément subjectif du pointage des 3 juges, qui auront préféré le volume des frappes pas toujours appuyés de Cissokho et sa stratégie élusive au pressing et à l’efficacité des (rares) coups de patte au but de Kavaliauskas – accumulant les mimiques de frustration, ce dernier faisait bien ses 37 ans en seconde partie de combat. En tant que promoteur de la soirée, « Souley » boxait à domicile, ce qui aura peut-être pesé dans la balance au moment de lui attribuer des cartes de  114-112, 115-111, et 116-110 quand un match nul n’aurait rien eu de scandaleux non plus. Si le Lithuanien est désormais le plus beau nom à son palmarès, et de loin, la manière dont Cissokho obtint cette victoire n’aura sans doute pas augmenté ses chances de combattre rapidement pour un titre mondial – ajoutons que son rayonnement marketing global reste très relatif. L’entourage de David Papot l’a bien compris, qui aspire à une affiche franco-française pour mettre en orbite planétaire le boxeur de Saint-Nazaire et a vite entamé le chambrage de rigueur. Vu d’ici, on ne dirait pas non.
Ni volé, ni très mérité. La boxe.
  • Si l’on n’a pas réagi à chaud sur le Cinco de Mayo baroque proposé cette année, point n’est besoin d’y revenir dans le détail. Tout juste saluera-t-on une fois de plus la furieuse maestria avec laquelle Naoya Inoue s’employa à sauver les meubles le dimanche soir à Vegas en livrant un duel étonnamment excitant à Ramon Cardenas, lequel justifia son surnom de « Dinamita » en exploitant la même faille du « Monster » Inoue que Luis Nery l’an passé : une main droite bien basse qui laisse une belle ouverture au crochet gauche adverse au moment de charger son bras avant en corps à corps. Plus de peur que de mal pour Inoue, qui encaissa sans frais au 2e round son second knockdown subi en carrière avant d’infliger à l’Américain 6 rounds de lessiveuse brevetée et de grapiller une 30e victoire (désormais 27 par KO) en autant de combats professionnels. En ce qui concerne les réunions de Times Square et Riyad qui précédèrent, on aura plus tôt fait de classer les 3 plus gros bides :
    • Numéro 3 : Devin Haney vs José Carlos Ramirez. 70 coups portés à 40, 224 coups donnés à 279, un rythme de poids lourds en bout de course sous Lexomil pour deux super légers dans la force de l’âge. Oui, Ramirez est un tout bon, mais non, Floyd Mayweather Jr. n’aurait jamais infligé une purge pareille à son public quels que fussent les reproches qu’on pût lui adresser, même avec ses mains abîmées de trentenaire. Si Devin Haney a récupéré son invincibilité sur le papier, il y a manifestement un avant et un après les crochets gauche au but de Ryan Garcia.
    • Numéro 2 : Ryan Garcia, justement. Après avoir cocufié la planète boxe entière en se pointant trop lourd et chargé comme une mule à son combat contre Haney, le mec a réussi à légitimer le pire clown vu au XXIe siècle en combat télévisé, j’ai nommé Rolly Romero, en se recroquevillant comme un opossum après en avoir pris une bonne. À moins que ce soit lui, le clown en question. Allons savoir.
    • Numéro 1 : l’annonce crépusculaire du superfight de septembre Canelo Alvarez vs Terence Crawford. Un Canelo émacié au jeu de jambes et à l’énergie de vieux quadragénaire : check. Un combat pour le titre incontesté des super moyens qui bat le record du plus petit nombre de coups échangés sur 12 rounds : check. Une ambiance de mausolée au moment où un Turki Alalshikh bien seul à jubiler invite « Bud » à venir défier le Mexicain : check. Perfection.
  • Il n’y avait certes pas que la soirée de Vegas pour sauver ce qui pouvait l’être : je reprend ici ce que j’avais posté sur les réseaux sociaux en réaction immédiate au combat de Bruno Surace. Force à lui.

Le théorème est connu : au plus haut niveau pugilistique, celui qui s’ajuste le mieux tactiquement remporte la revanche, et Munguia vs Surace 2 n’y fit pas exception. Après un second revers de rang – son premier du genre avant la limite – Jaime Munguia a réagi en champion, c’est à dire en boxeur intelligent ET capable de faire appel au meilleur de la crème du haut de gamme de son sport. En s’offrant les services d’Eddie Reynoso, le Mexicain a signé pour gagner, pas pour assouvir un rêve de vengeance riche en testostérone à base de KO expéditif dans la fureur et le bruit des « Me-xi-co ! Me-xi-co ! ». Et il a eu raison, comme Wladimir Klitschko ou Lennox Lewis après qu’ils eurent recours aux lumières d’un Emmanuel Steward pour se remettre de bien vilains KOs.

Munguia a eu raison parce que Reynoso a fait du Reynoso, il a analysé l’adversaire et expliqué au tableau noir comment le priver de son arme de son prédilection – la droite des enfers en contre reçue garde ouverte en reculant après une série -, et que l’ex-champion WBO des 154 livres a fait ce qu’il lui a dit. Et point. Munguia a commencé lentement, il ne s’est pas enflammé sur les tentatives précoces de Bruno Surace de lui faire voir rouge, il a travaillé au corps avec application – sans paraître gêné par la ceinture haute du Français – en sachant que les efforts paieraient en seconde partie de combat, il a très longtemps limité ses combos à 3 coups au maximum et il s’est appliqué à garder mains hautes et coudes serrés sur chaque retrait. Bref, il s’est ajusté.

Et Munguia garda les mains hautes…

Face à lui, « Brunello » Surace, on l’a dit, démarra de manière intelligente et propre : donner franchement un jab qui pique, ne pas hésiter à lancer la droite en contournant la garde adverse, alterner les déplacements et varier les contres sur les rares assauts appuyés de Munguia, le crochet gauche étant moins attendu que le bras arrière. Sa tactique permit au Marseillais vêtu de bleu et blanc de faire jeu égal sur la première moitié du combat, déjà une sacrée putain de satisfaction pour quiconque était aussi tendu que moi devant DAZN. Las, au fil des minutes, un Munguia admirablement cornaqué par Eddie Reysoso imposait sa puissance et son pressing jamais désordonné pour engranger round après round.

On aurait aimé voir Bruno basculer sur un plan B, peut-être en conservant l’initiative derrière son jab, au lieu de chercher jusqu’au bout le même contre du droit qu’en décembre dernier. On aurait aimé entendre son coin lui demander de passer la cinquième après le 8e round, quand la situation devenait délicate aux points. On aurait aimé voir un peu plus de travail au corps ou d’uppercuts pleins de venin, comme Surace en passa un ou deux de belle facture. Plus simplement, on aurait aimé le voir contester jusqu’au bout des championship rounds la décision implacablement façonnée par le cyborg auquel ressemble beaucoup le Munguia version Reynoso. 116-112 et deux fois 117-111, soit un trio de cartes aussi frustrantes que difficiles à contester… et formidables parce que frustrantes, justement.

Car quiconque ne saluerait pas une nouvelle performance de gala du Français derrière cette première défaite concédée en carrière face à un millionnaire du ring aurait la mémoire courte. Jamais plus titré qu’au – second – niveau européen, habitué du casino de Hyères ou du gymnase de Venelles, Bruno Surace a tenu 12 rounds de mieux, en co-tête d’affiche de la plus prestigieuse des soirées pugilistiques de l’année – le Cinco de Mayo -, contre un puncheur de niveau mondial auquel il inspira assez de respect pour refondre intégralement son plan de vol auprès du meilleur coach de l’époque. Il aura certes manqué à Brunello l’expérience d’un Reynoso pour s’adapter au fil des rounds, voire celle d’un préparateur capable de lui faire regagner 10kg après la pesée. C’est sur de tels détails que se jouent fréquemment les combats entre boxeurs de l’élite, et ces détails-là ont un prix, encore largement inabordable pour un boxeur tricolore d’honnête réputation continentale jusqu’à décembre dernier.

Respect.

En pareil contexte, la copie rendue s’avère remarquable et l’avenir des plus prometteurs. Bruno Surace encaisse le plomb, garde les mains hautes, bouge bien, ne panique jamais, déroule une technique assurée, n’affiche aucun défaut physique rédhibitoire, sait appliquer une stratégie à la lettre et a déjà prouvé qu’il pouvait faire mal à un cador dans une catégorie nouvelle pour lui – les 19 rounds contre Munguia constituent, rappelons-le, sa seule expérience à 168 livres… Qu’on soit frustré par sa défaite de samedi soir est précisément le plus bel hommage qu’il soit possible de rendre à Brunello, 27 ans sous la toise et quantité de rêves désormais légitimes sous la mèche gominée. Comme Jaime Munguia avant eux, numéro 2 mondial qu’il ne cessa de regarder dans les yeux, aucun de ses futurs adversaires ne pourra faire l’économie d’un travail approfondi sur les forces et faiblesses du Français.

Ce statut-là, gageons que l’intéressé a les épaules pour l’assumer : il suffit pour cela de le lire ou de l’écouter. Le brelan d’as qu’il constitue désormais avec ses compatriotes Christian Mbilli et Kévin Lele Sadjo en super moyens n’a pas d’équivalents dans notre histoire pugilistique récente, et qu’ils finissent enfin par guerroyer en attendant mieux apporterait aux aficionados français un bonheur de fan britannique – autant dire inespéré. La Fédération Française de la Lose dirait combien c’est en perdant qu’on s’affirme pleinement comme un champion français. On serait tenté d’écrire ici que le combat de samedi aura consacré Bruno Surace de la sorte. Mais sans rire. Du tout.

Le MMA va bien, merci pour lui (Guillaume) /

  • Parlons MMA, parlons de l’UFC 315, carte à gros enjeux tricolores qui se déroulait à Montréal hier soir. D’abord le retour de Benoit Saint-Denis, version upgradée par son nouveau coach Nicolas Ott, pour tirer un trait une bonne fois pour toutes sur la défaite à Paris en septembre dernier. Son adversaire initial ayant déclaré forfait, c’est le besogneux Kyle Prepolec qui servirait de rampe de lancement au BSD nouveau. Plus rapide, plus fort, plus dangereux, plus stratège aussi. Donc à même de garder le « God of War » en laisse quand la tentation de déchainer les enfers menace de l’emporter sur toute considérations défensives. Mission accomplie mon général ? Oui… À priori. Certes, le Français n’a fait qu’une bouchée du cousin canadien. Plus petit en taille et en allonge, plus vieux et moins épais, Prepolec avait son courage pour lui et l’orgueil du combattant pour refuser de céder au narratif (désolé Antoine) pré-emballé. Ce qu’il réussit durant le premier round, face au Blietzkrieg tacticien de son adversaire, mi BSD mi Nicolas Ott. Offensif mais les mains bien hautes, Saint-Denis avance, amène Praypec au sol, et déroule une démonstration de grappling pendant 5 minutes. C’est beau, maitrisé, dominant, mais… Pas spectaculaire.
Le God of War règne sur un adversaire très humain.
  • En tout cas pas pour la team Tacos/Unibet, qui rappelle à coup de sifflets qu’ils sont pas venus pour se faire chier avec les subtilités de la discipline. Ils en veulent pour leur argent. « On s’en fout » lui répond Ott pendant la pause. Mais pas Benoit, qui vient de louper à une dizaine de secondes près une soumission premier round par étranglement de la mâchoire. L’élastique, il est tendu comme un string au carnaval de Rio. Il est temps de lâcher les chiens, qui déferlent sur le canadien une fois la cloche sonnée. BSD fait alors du BSD victorieux et vintage: pression maximale sur son adversaire, il resserre le noeud coulant en pieds-poings pour libérer de l’espace en grappling, et obtient l’abandon par soumission. Victoire ? Victoire. Avec la manière, et les hourrahs des soiffards et leur pulsion scopique enfin rassasiés. Tout le monde est content. À part la défense, qui a encore loupé l’avion. Car Saint-Denis y est allé les mains basses. Très basses. Trop basses. Pas de problème en l’état face à un adversaire « normal » et trop asphyxié par la pression adverse pour rester lucide. Mais confronté au niveau élite de la division, la sentence ne pardonnera pas, et Saint-Denis l’a déjà appris à ses dépens contre Dustin Poirier l’an passé, qui plus est sur une configuration quasiment similaire. La foule, c’est le meilleur ami de l’entertainer, et le pire ennemi du plan de vol quand les choses se gâtent. BSD a gagné ce soir oui, mais les mains en avant et le menton à la fenêtre quand la foule s’est mise à réclamer du lui-mème. Même le God of War a un maitre, et celui-ci est capricieux.
  •  » La seule deuxième chance que l’on a dans la vie, c’est de faire deux fois la même erreur. » Pour le peuple de France, ça consiste à gagner la guerre avant de la disputer, sans prêter plus d’attention que ça aux paramètres du champ de bataille. À l’instar de Cyril Gane contre Jon Jones, Manon Fiorot semblait donnée assez largement donnée favorite par chez nous dans son combat pour le titre dument mérité contre la reine Valentina Schevchenko. C’était LE moment, pour elle et pour le MMA français, d’écrire l’histoire avec une ceinture de l’organisation reine à la clé. On se gardera bien de jeter la pierre à  » The Beast » et à son camp. À ce niveau de compétition, la certitude de gagner est une condition sine qua non pour avoir une chance de l’emporter effectivement. On ne dénoncera pas non plus le réflexe du chauvinisme sportif, qui soude un peuple derrière ses athlètes à l’international. Mais un peu de lucidité quand même. En l’occurrence, il ne s’agit pas de sous-évaluer Manon Fiorot, mais de rappeler qui est Valentina Schevchenko. Championne de sa caté oui, mais surtout GOAT potentielle du MMA féminin de l’UFC (donc du monde).
Si loin, si proche…
  • Oui, elle a perdu et récupérer son titre dans la douleur face à Alessandra Grasso. Oui, elle a perdu par deux fois- dont une défaite litigieuse – face à Amanda Nunés, la Brésilienne venue à bout de Ronda Rousey et Cris « Cyborg ». Mais ça fait surtout 10 ans qu’elle exécute toutes celles qui lui mettent une cible dans le dos- dont des grands noms. L’estimer prête à céder son trône parce que vieillissante à 36 ans, c’était aller un peu trop vite en besogne, et sous-estimer sa capacité à combattre en championne. C’est à dire avec un minimalisme professionnel, les paramètres du combat maitrisés à la virgule près pour ne rien faire de plus que le strict nécessaire pour l’emporter. Un jab balistique, une gestion implacable de la distance (alors qu’elle était plus petite), un timing à toute épreuve, et quelques fancy moves de highlights pour marquer les esprits. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour les juges ça veut dire beaucoup, un point après l’autre sur les cartes.
  • Lue comme un livre ouvert et en temps réel, la Française a payé son déficit d’adaptation. Et ce malgré les consignes de son coin lui intimant d’arrêter de faire le jeu adverse avec ses kicks, et de se concentrer sur l’anglaise pour rentrer en lutte. Ce n’est pas que Manon Fiorot se soit fait outrageusement dominer. Du succès, elle en a eu, même au point de choper deux rounds mérités en sa faveur. Mais elle faisait face à une calculatrice de combat, qui savait parfaitement comme ne jamais se mettre en danger. « The Beast » s’est tout simplement vu rappeler la frontière qui délimite l’excellence de l’élite. Ce que Rose Ramajunas était à deux rounds de lui rappeler à Paris en septembre dernier. Qu’on ne s’y trompe pas, Manon Fiorot reste une combattante formidable, n’en déplaise à tous les footix du MMA qui auront tôt fait de retourner leur veste sur les réseaux ce week-end. There is just levels to this game.
  • Un petit mot quand même sur la meilleure blague de la soirée: « Il a des mains comme Canelo ». C’est ce que le coach de Belal Muhammad disait de son poulain, lutteur émérite et champion des welters, avant sa première défense de titre contre Jack Della Maddalenna. Mais soyons clairs : en dépit de ses dernières sorties laborieuses, le Mexicain ne mérite pas ça. Muhammad a deux choses pour lui en pieds-poings : un mâchoire en acier bien trempé, et un embrayeur bloqué en marche avant. Un peu court pour mériter la comparaison, et surtout jouer son titre sur un terrain qui n’est pas le sien, face à un Della Magdelana qui a bien profité de l’excès de confiance adverse pour reprendre plusieurs fois du dessert. Déplacements, mouvements de buste, précision, combinaisons à quatre coups voir plus… Della Maddalena s’est lancé dans une véritable démonstration de gala d’arts martiaux, braquée plein phares en direction d’une cible pas vraiment mouvante. En comparaison, Muhammad ressemblait à un poids trop lourd pour ne pas se déplacer comme orang-outang et bien trop rudimentaire techniquement ne pas ouvrir la porte à toute les fenêtres à chaque prise d’initiative – et il y en a eu.
Un Muhammad roux-é de coups.
  • Muhammad ne doit sa survie qu’à un menton aussi dense que le mental (c’est déjà beacoup), et l’appréhension de sa lutte par la partie adverse. Que Della Magdalena a d’ailleurs fort bien réussi à défendre en temps voulu, lorsque Muhammad a commencé à sentir l’odeur « carottes trop cuites » au niveau des points. Il manquait manifestement d’un Khabib dans son camp pour l’empêcher de céder au péché d’orgueil de Ronday Rousey en son temps : le grappler qui se rêvait boxeur. Victoire par décision logique pour l’Australien qui devrait si tout va bien affronter Islam Makhachev pour sa défense de titre. Le champion russe effectuerait sa montée pour l’occasion après avoir assuré son héritage en lightweights. À voir si les belles choses déployées par Della Magdelana en termes de défenses de lutte daghestanaises feront effet contre l’éminence actuelle du bail. Peut-être le début d’une ère ? On a hâte.

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