Punchlines du 28 avril 2025

Le site (Antoine) /

  • De nouveau des Punchlines du lundi, et peut-être les dernières avant quelque temps pour cause de congés. En même temps, on espère que vous aurez de quoi vous occuper pendant les ponts de mai.
  • Et si tel n’était pas le cas, voici de quoi meubler une grosse heure et retrouver les deux rédacteurs de la présente e-feuille de chou : Guillaume et son complice Fouad m’ont invité sur leur chaîne Youtube L’Heure Magique pour revenir sur rien de moins que mon film préféré, Impitoyable de Clint Eastwood. Spoiler : ce fut un panard pas possible.

Il est temps de rallumer la littérature (Antoine) /

  • Séjournant régulièrement à Toulon pour motif professionnel, j’en enfin passé une tête dans la librairie emblématique du centre ville, un vaste établissement portant le nom de Charlemagne – gageons que ça devait plaire au temps du maire Le Chevallier (ceux qui savent, savent). Sacrée boutique que celle-là, dotée d’un vaste espace dédié aux fournitures de bureau et d’une buvette en laquelle se tiennent régulièrement soirées littéraires et cafés philo. Un tour d’horizon attentif du rayon « fiction » permet d’affirmer qu’on est entre gens de bonne compagnie, vu la place dévolue à l’Arbre Vengeur ou aux Editions du Sonneur sur les tables et la mise en avant de Desiree (Allia), dernier opus de Frédéric Roux. Ça m’a donné envie d’y faire quelques emplettes, un phénomène qui se raréfie compte tenu de la quantité de bouquins remplissant régulièrement ma boîte aux lettres. Bref : une bonne maison. Il fallait que ce soit dit.
Butin de Charlemagne.
  • Vous trouvez ennuyeux le cyclisme professionnel de 2025 ? Imaginez un Tadej Pogacar qui aurait les moyens d’occuper à lui seul toutes les marches du podium : voilà qui résume l’état actuel des ventes de livre en France, l’Américaine Freida McFadden trustant même les quatre premières places avec La Psy, La Femme de ménage, Les Secrets de la femme de ménage et La Prof. Même Joël Dicker est relégué en septième position. Il faut peut-être remercier Freida McFadden.
  • Le numéro de mai du magazine Lire est en kiosques, l’occasion de signaler la publication de trois romans lisibles : Tiré de faits irréels, une plongée dans le monde de l’édition germanopratine étonnamment digeste en dépit de la profusion d’archétypes signée Tonino Benacquista chez Gallimard, une variation dépaysante – puisque bolivienne – du roman initiatique intitulée Séoul, São Paulo de Gabriel Mamani Magne (Métailié), et L’homme qui aimait les livres de Patrick Dewitt (Actes Sud), étonnante mise en abîme démontrant que même les vies les moins romanesques – en l’occurrence celle d’un bibliothécaire de l’Oregon – peuvent faire de bons romans. Rien d’absolument incontournable, mais du divertissant.
  • À l’occasion de la Fête de la librairie indépendante de samedi dernier, le Centre National du Livre a publié une étude du secteur pour l’année 2024 dans laquelle on voit poindre des lendemains qui déchantent, après une période post-covid euphorique pour des commerces redevenus essentiels aux yeux des Français une fois qu’on en eut interdit l’accès – sommes-nous à un paradoxe près ? Bref, selon le site ActuaLitté, si le solde (créations – fermetures) reste positif, il est en décroissance, et les chausse-trappes tels que l’augmentation des coûts fixes, la baisse du panier moyen et la concurrence du livre numérique laissent augurer une poursuite du phénomène cette année. Est-ce à dire qu’on reverra toute une génération d’habitants trentenaires des centres-villes de nos métropoles raccourcir barbes et cheveux avant de retourner bosser en cabinets de conseil et agences de com’, tels les ex-cavistes bio des années 2010 ? On caricature, certes, vu que 60% des créations de librairies enregistrées depuis 2021 le furent dans des villes de moins de 15.000 habitants. En tout cas la majorité des fermetures concernent des établissements dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 200.000 euros – vu la faiblesse des marges, ça ne laisse pas grand-chose pour payer le quinoa et les fringues sur Vinted – et trahissent des projets de reconversion plus ou moins bien pensés, notamment en termes d’implantation géographique. « L’emplacement, l’emplacement et l’emplacement » restent les trois mamelles du commerce physique, qu’on vendre des livres ou du vin bio.
  • « Lire un polar devrait être remboursé par la Sécurité Sociale » : ainsi s’intitule la dernière interview accordée par Frank Thilliez à Livres Hebdo. Je ne dis pas qu’il a tort, je dis juste qu’un (très) gros vendeur s’exprimant comme une Big Pharma suscite un je-ne-sais-quoi de gratouillant.
  • J’ai suffisamment moqué l’immobilisme complaisant de La Grande Librairie pour saluer l’initiative du mercredi 30 avril prochain : sortir du studio pour aller visiter les terres de Marie-Hélène Lafon (Cantal), Sandrine Colette (Morvan), Christian Signol (Quercy), Mathilde Beaussault (Côtes-d’Armor), Jean-Marc Rochette (Isère) ou Pierre Bergounioux (Corrèze), ainsi que le conteur Bruno Hennriques (Bourbonnais) et l’écrivaine publique Anne Menucci (Moselle). Reste à espérer un traitement un chouïa plus haut de gamme qu’un pendant télévisé de la marque Nos régions ont du talent ! – à ce propos, rappelons que plus d’un quart des livres neufs vendus en France le sont en grande surface. Ça n’a pas grand-chose à voir avec La Grande Librairie, mais c’est vrai.

Le cinéma est mort, la preuve : il bouge encore (Guillaume) /

  • Parlons cinéma, parlons d’une catégorie de films dont on a pas l’habitude de parler, ici et ailleurs : ceux qui ne nous plaisent pas, mais méritent d’être défendus. Faut savoir penser contre soit même de temps à autre, et dans une certaine mesure c’est l’exercice auquel nous oblige Sinners de Ryan Googler, en salles depuis 10 jours.
  • Sinners, c’est quoi ? Un film de vampires, une comédie musicale, une chronique de la ségrégation dans le sud des États-Unis dans les années 30. Du vaudou, de l’histoire, de la politique, de l’horreur. Un récit de l’oppression à travers les genres, les frontières et les couleurs de peau, qui court après la même chose que ses personnages : la liberté. Mais quelle liberté, et comment ? Celle que deux frères jumeaux et gangsters essaient d’acheter avec l’argent piqué aux caïds de Chicago pour ouvrir un Night-Club dans leur Mississipi natal, en vertu du célèbre proverbe stipulant que « Green is the only color in America ? ». Ou celle proposée par les vampires qui se mettent à taper à leur porte la nuit tombée ? À savoir une morsure, le sacrifice du jour et des vivants, mais un voyage sans fin à travers l’espace et le temps à l’arrivée ? Vous avez deux heures, 90 millions de dollars de budget piqué à la Warner, une liberté créatrice quasi-totale.
I want YOU in my team
  • Sinners est un film passionnant, comme toutes les œuvres qui se donnent les moyens d’enfoncer les portes fermées. C’est quoi, la liberté pour un afro-américain dans l’Amérique de 2025 ? C’est quoi, la liberté pour un artiste qui a passé deux films à négocier la sienne avec le cahier des charges de franchises milliardaires (Creed, et Black Panther) ?
  • Coogler ne cherche pas son chemin de réponse chez les autres, mais essaie d’inventer le sien. Jusque dans son usage de l’IMAX, ici moins prompt à rajouter 10e de taxes au spectateur pour des images forcément plus impressionnantes que d’essayer une grammaire propre à ce format (voir l’usage des plans frontaux dans les scènes de concert). Visuellement, il faut bien qualifier de somptueuse la mise en scène du cinéaste, désireux de sortir son A-game pour un projet manifestement murit depuis longtemps. Sinners ne répond ni aux codes, ni aux formules ni aux injonctions de l’air du temps, auxquelles on a souvent reproché (à raison) à Coogler de se plier. C’est un film de libération, dans tous les sens du terme, qui postule aussi cette libération (créatrice, politique, sociale) pour les autres.
  • Bref, respect. Même si ici, ça coince quand même un peu.
  • Parce que la liberté que Coogler cinéaste veut s’accorder n’est jamais vraiment celle qu’il accorde au spectateur. En bon velléitaire de la paraphrase filmée et du sens littéral, Coogler tombe trop souvent dans l’illustration de son propre manifeste. Des moments supposés hors de l’espace et du temps, comme ce plan-séquence qui danse et célèbre sur plusieurs temporalités, restent désespérément unidimensionnels à force de s’accrocher à la voix off. À l’instar de Damien Chazelle, Ryan Coogler fait partie de cette génération de cinéastes-réseaux, qui se soucient avant tout d’être compris au pied de la lettre et à la cheville de l’image. Sans beaucoup de marges de manœuvres pour le spectateur, au moins sûr de ne pas se tromper sur ce que pense l’œil derrière la caméra, à défaut de pouvoir se l’approprier. Sinners est un film qui créée son propre chemin oui, mais refuse au spectateur la possibilité d’inventer le sien. Pas le moins intéressant des paradoxes, ni des discussions. Du cinéma, au moins.
  • Maintenant, parlons quelques lignes des films qui n’inventent rien, mais (se) répètent beaucoup. HavocRavages en terre de gaulois réfractaires-, c’est le dernier action flick made in Netflix. Le film a mis le temps avant de débarquer sur la plate-forme, et pris en conséquence celui de susciter les fantasmes les plus fous. Pensez donc : le réalisateur de The Raid 1 et 2 derrière la caméra, Tom Hardy en berserker affiché de la bagarre devant, et une promesse de polar hard-boiled renouant avec les heures les plus fastes du genre. N’en jetez plus, la coupe est pleine et le spectateur matinal pour son blast d’adrénaline le jour J et à l’heure H. Le résultat ? Et bien, tristement prévisible.
  • Havoc n’est ni avare en action ni en violence, mais maintient l’encéphalogramme désespérément plat. En esthète mal assumé de la mâchoire cassée et des douilles fumantes, Gareth Evans sacralise le mouvement au détriment de sa finalité et la moralisation du propos à l’expérience du spectateur. Forcé de coltiner la tronche de chien battu de Tom Hardy et ses pensées pour lui-même murmurées à voix-basse et écrites avec le manuel du flic-qui-en-peut-plus-d’en-avoir-trop-fait-et-trop-vu sur les genoux, l’amateur de bastons vénères devra revoir ses attentes à la baisse pour en avoir pour son abonnement mensuel. Notamment fermer les yeux sur le coloriage numérique pas toujours très gracieux des ruelles plus si crades et plus si fumantes d’une mégalopole anonyme abandonnée à la débauche, et concéder le pilote automatique au cinéaste.
Acting de chien mouillé.
  • On savait déjà qu’Evans n’était pas cinéaste des championships rounds : le chargeur vide à la mi-temps, et plus grand-chose à proposer à mi-parcours. Mais sur Havoc, il recycle carrément les cartouches des films précédents, en moins bien : des bastons à la The Raid shootée de la même façon pour tout le monde, du Gangs of London en moins bien sur le climax, du revival de The Raid 2 pour ses gangsters de yaku-eiga. Havoc n’utilise même la physionomie de diable de Tasmanie de Tom Hardy pour lui faire faire autre chose que le tout-venant astreint aux figurants. Que Havoc n’invente rien n’est pas un problème en soit. Qu’il n’invente rien en revanche, c’est une autre paire de manches.

Ce qui reste de la boxe anglaise (Antoine) /

  • Mais pourquoi diable ai-je regardé Eubank Jr. vs Benn ? Avoir bu un coup le samedi soir explique-t-il vraiment qu’on puisse cautionner ainsi tout ce que l’on déteste ? Pour brocarder la tête d’affiche d’une soirée intitulée « Fatal Fury », j’avais l’embarras du choix. D’abord, l’opposition offerte aux 70000 spectateurs du Tottenham Hotspur Stadium n’avait aucun enjeu sportif, le titre mondial IBO – soit du papier crépon – de Eubank n’étant même pas en jeu. Ensuite, il fallait à nouveau s’acquitter de 25 balles pour regarder une tête d’affiche de salle des fêtes, tout en se rappelant le temps pas si lointain où DAZN proclamait la fin du pay per view. Ajoutons à cela qu’en dehors de leurs patronymes fameux, ni le fils du « Dark Destroyer » Nigel Benn ni celui de Chris « Simply the best » Eubank Sr. n’avaient grand-chose à proposer qui les rende particulièrement sympathiques. Dans le coin bleu, Conor Benn, regard noir et attitude de petite frappe des beaux quartiers, puncheur frustre mais invaincu face à une copieuse brochette de tocards et chevaux de retour fatigués, de surcroît épinglé pour consommation d’un substitut à la testostérone en 2022, date à laquelle fut initialement programmé le duel de « fils de ».
  • Dans le coin rouge, Chris Eubank Jr., qui s’emploie depuis bientôt 15 ans de carrière professionnelle à démontrer pourquoi son papa nous intéressait et pas lui, boxeur athlétique et besogneux dénué de l’étincelle d’intelligence qui change tout – le voir aussi perplexe face au jab de George Groves qu’une poule devant un couteau valait toutes les explications. Pour couronner le tout, le duel était proposé dans des conditions plus ou moins favorables, puisqu’à 35 ans Eubank doit littéralement s’assassiner pour continuer à faire la limite des poids moyens – il devra payer 375.000 livres d’amende pour l’avoir loupée de 22 grammes – tandis que Benn dispose au mieux du châssis d’un poids welter. Même en vous faisant grâce de la subtilité éléphantesque dont on fit preuve pour promouvoir l’événement – elle fut à son acmé le jour à Eubank écrasa un œuf sur la figure de son rival, histoire de moquer les explications foireuses de son contrôle positif au clomifène – avouez que, sur le papier, The Voice faisait un concurrent sérieux à ce Fatal Fury au moment de choisir son programme télé du samedi soir.
On ne fait pas d’omelette, etc.
  • Seulement voilà, on n’attrape pas plus efficacement un tout frais quinquagénaire qu’en lui promettant un shoot d’adolescence pure, et un « Eubank vs Benn » vaut son pesant de Malibu-orange et de Chesterfield à 10 francs le paquet consommés en cachette. En ce début de décennie 90, la scène anglaise des poids super moyens avait des airs d’Amérique 10 ans plus tôt, les personnages rayonnaient et les combats en donnaient pour son abonnement au fidèle de Canal Plus. Chris Eubank Sr., c’était le résilient, le costaud qui palliait une technique perfectible par une incomparable dureté au mal, et qui dissimulait sa timidité et sa voix grêle derrière un masque hautain et des costumes de prix le rendant adorablement détestable. Nigel Benn, lui, arborait la figure plus classique du très confiant démolisseur en série, et ses états de service lui donnaient plutôt raison – quand bien même s’engager à ce point dans ses frappes de mule lui valut une ou deux pannes sèches, comme celle qui lui coûta une défaite par KO des mains d’Eubank Sr. un soir de novembre 1990.
  • Si la revanche – qui remplit trois ans plus tard un stade d’Old Trafford où Eric Cantona se produisait un week-end sur deux – se solda par un nul et entérina la supériorité d’Eubank dans leur duel, Le Dark Destroyer put se prévaloir, au contraire de son rival, d’avoir accepté les défis d’outre-Atlantique, comme lorsqu’il régla le compte d’Iran Barkley à Las Vegas en un round et trois knockdowns bien sonnés. Et puis Benn vs Eubank, c’était pour l’ado que j’étais toute la richesse d’émotions parfois troubles, le rappel que la boxe anglaise se jouait pour de vrai, deux hommes qui pour rester champions durent infliger l’irréparable – Eubank lorsqu’il remporta sa revanche face au culturiste Michael Watson, Benn quand il fit taire à jamais l’épouvantail du Kronk Gym Gerald McClellan. Vus en direct, ces combats-là m’avaient fasciné au-delà du raisonnable. C’est au nom de tels souvenirs que j’ai payé pour voir ce qui s’annonçait comme une pantalonnade entre deux rejetons jamais vraiment dignes de leurs géniteurs. Pas de quoi être fier, en tout cas au moment de renseigner mon code de carte bleue.
C’est quand même souvent le plus grand qui gagne.
  • L’inconscient fait parfois bien les choses vu ce qui s’ensuivit. D’abord, un frisson irrépressible lorsque Eubank Jr. se présenta aux côtés de son Simply the best de daron sur l’hymne de Tina Turner, puis l’attrait d’une hostilité visiblement pas feinte au moment du staredown. Au strict plan pugilique, on put d’abord craindre qu’un Eubank lessivé prenne vite la foudre : son jab mou contrastait avec l’explosivité de Benn, même si le cadet peinait à cadrer. C’est dans les rounds médians, lorsque Eubank fut assuré qu’il pouvait d’autant mieux prendre le punch adverse que Benn avait déjà brûlé beaucoup de son gaz, que le duel se mua en combat rapproché. Malgré les 35 ans, le régime drastique et une clause contractuelle limitant la réhydratation à 170 livres le jour du combat, Eubank conservait une caisse supérieure et pouvait enchaîner de près – ce qu’il paya sur un saignement dû à un coup de tête involontaire à la 9e reprise. Sans réponse tranchante au volume de coups de son adversaire, Benn acceptait néanmoins la bagarre, et si la guerre totale proposée par les protagonistes n’atteignit jamais des sommets techniques, le supplément d’âme manifeste qu’ils mirent tous deux à se rectifier le portrait eut de quoi enthousiasmer tout amateur de peignées bien viriles. Enfin sonné dans le dernier round, Benn ne baissait pas pavillon pour autant, et l’on eût pu imaginer les deux « fils de » poursuivre les amabilités jusque tard dans la nuit londonienne.
  • Vu les circonstances, je redoutai alors un match nul récompensant façon École des fans cette manière d’exhibition freudienne en 12 rounds, mais les juges eurent le bon goût de pointer l’affaire objectivement, rendant tous trois une carte de 116-112 en faveur du plus travailleur et technique des deux, un Chris Eubank Jr. hurlant à genoux à l’annonce du résultat. Benn, lui, semblait dévasté au micro de DAZN. Si l’un comme l’autre toucheront un chèque inespéré au regard de leur mérite sportif – on parle de 10M de livres pour Eubank et 8 pour Benn -, voire obscène en considérant par exemple la rareté des montants à 7 chiffres dans les catégories qu’on dit « petites », leur sincérité pendant et après le combat n’était pas feinte. La psyché des fils de boxeurs célèbres poursuivant une carrière en professionnels est une énigme ; que leur père s’oppose à ce choix ou qu’il leur fasse sentir combien leur enfance dorée les prive d’un ingrédient essentiel à la réussite, parvenir à lui prouver quoi que ce soit est une gageure. Jamais Chris Eubank Jr. ou Conor Benn ne s’assoiront à la table de leurs paternels au valhalla des boxeurs britanniques, sans doute eux-mêmes en sont-ils conscients, et cependant ils ont relevé un défi guère banal : se hisser hier soir à la hauteur d’une occasion bien trop grande pour eux. Ceux qui parlent déjà du combat de l’année gagneraient à se se rappeler Beterbiev vs Bivol II, ou bien le simple fait qu’on soit encore au moins d’avril. Mais ça valait mes 25 balles, et c’est déjà beaucoup.
Hommage du papa au fiston vainqueur.

Le MMA va bien, merci pour lui (Guillaume) /

  • Parlons de MMA, parlons de Ian Machado Garry, qui faisait son retour hier soir contre Carlos Prades, après sa défaite concédée à pas grand-chose contre Shavkhat Rakhmonov en décembre dernier. Ici, le col était moins raide, mais pas moins périlleux. Surtout en short notice, le deuxième d’affilée pour Garry contre un gros client de la caté. Membre éminent l’équipe d’enfants terrible des Fighting Nerds, Prades avance en conquérant depuis son arrivée à l’UFC : 4 combats (en un an !), 4 KO, 4 bonus de la soirée. Autant dire que même avec un camp d’entrainement, l’affaire n’était dans le sac pour personne. Au quasi pied-levé, c’était du quitte double pour Garry : en cas de défaite, les couilles peut-être trop grosses pour le cerveau, en cas de victoire un potentiel title-shot.
  • L’histoire a statué : ça sera (on lui souhaite) le title shot.
  • Pourtant, il en a bien fallu être autrement. Dans les derniers instants du cinquième round, lorsqu’un Prades malmené 23 minutes durant réussit à inverser la position pour assener un ground and pound sauvage à l’Irlandais. Mais Garry a tenu bon. Pas question de se laisser submerger par la panique après avoir « walk the line » pendant 4 rounds de prestations exemplaires en termes de Fight IQ.
  • Car pour « The Future », la guerre est définitivement une histoire de stratégie. Contre un gaucher en garde de Muay Thai braqué sur la marche avant pour acculer ses adversaires, Garry a convoqué tout ce que l’éventail du MMA lui offre pour contrer l’adversité. Rester à l’extérieur, varier les angles et les niveaux, produire du volume pour empêcher Prades de profiter de son allonge de gaucher, feinter le direct pour passer en lutte ou vice-versa. On en profite d’ailleurs pour tirer notre chapeau au brésilien, la dent méchamment dure pour ce qui est de défendre de la défense de takedowns. Victoire par décision logique et oh combien méritée pour l’Irlandais, surement l’un des meilleurs combattants sur cinq rounds de la caté. Et aussi celui qui présente un profil que l’on aimerait voir plus souvent valorisé : le MMA qui privilégie la stratégie plutôt que le KO à tout prix, et le MMA qui se moque de plaire aux assoiffés de slugfest.
La tête froide, même sous le marteau.

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