Le site (Antoine) /
- Encore un lundi ? Encore un lundi, ce qui laisse le temps d’une couverture in extenso de l’attribution du Prix Goncourt 2024.
Il est temps de rallumer la littérature (Antoine) /
- Alors voilà : c’est un séisme, on n’a rien vu venir. Kamel Daoud remporte le Prix Goncourt 2024.
- Comme c’était un poil prévisible, trois des quatre finalistes dudit Prix Goncourt sont déjà dans le top 10 des meilleures ventes parmi les romans de la rentrée. En première place, Gaël Faye distance la concurrence avec 161000 exemplaires écoulés pour Jacaranda, et son Renaudot ne lui fera aucun mal en termes de marketing. Le lauréat Kamel Daoud se classe pour l’instant 5e avec Houris, talonnant Olivier Norek et ses Guerriers de l’hiver (77000 ventes contre 79000). Enfin, Sandrine Colette occupe la 8e position avec Madelaine avant l’aube (33000 exemplaires vendus). Seule Helène Gaudy et ses Archipels reste pour l’heure en retrait de ce classement. L’académie des 10 convives de chez Drouant confirme ainsi sa réputation en tant que dénicheuse de pépites passées sous les radars. Ou pas, mais il faudrait être sacrément candide pour affirmer le découvrir en 2024. Rappelons qu’en France le tirage moyen d’un livre s’élève à 5000 exemplaires et qu’environ 4000 trouvent un acheteur, un chiffre évidemment dopé par les bestsellers – pour L’Express, les ventes ordinaires d’un premier roman oscillent ainsi entre 500 et 800 exemplaires.
- Le débat public contemporain appliqué au secteur de l’édition, épisode 4389 : publié en 2023, le tome des aventures de Spirou par Yann et Dany intitulé Spirou et la gorgone bleue a été retiré de « l’ensemble des points de vente » par Dupuis. La maison belge s’est également fendue d’un message d’excuses. En cause : « la représentation des personnes noires et des femmes » dans la bédé, à l’origine d’un émoi relayé la semaine dernière sur les réseaux sociaux. On y pointait ainsi un dessin jugé trop sexualisé des personnages féminins, ainsi que l’allure réputée simiesque des Africains sous le crayon de Dany. Suffisamment d’extraits sont disponibles sur internet pour que chacun puisse se faire sa propre idée sur la question. On pourra juste noter que même les bandes dessinées au scénario cochant toutes les cases du progressisme contemporain – ici la lutte d’une association écologiste 100% féminine contre un magnat de l’industrie polluante – sont susceptibles d’être rattrapées par la patrouille. Selon Livres Hebdo, le dessinateur âgé de 81 ans confiait l’an passé avoir été invité à revoir certains détails de son travail avant sa validation définitive. Reste que plus d’un an après sa parution, Dupuis déplore maintenant « un style de représentation caricatural hérité d’une autre époque« . Courage, fuyons. Comme c’était prévisible, Spirou et la gorgone bleue occupe aujourd’hui la tête des ventes sur Amazon, qui l’affiche en rupture de stock. Spirou rejoignant Gabriel Matzneff sur les étagères des bibliophiles portés sur le sulfureux, voilà qui relevait de la grosse cote.

- Censure toujours, la présence du Club des enfants perdus de Rebecca Lighieri (P.O.L) dans la première liste du 37e Goncourt des lycéens a suscité l’émotion de l’association SOS Éducation, qui s’est fendue d’un courrier au Premier ministre affirmant qu’un bouquin comportant des scènes de sexe à la diable et la description d’une jeunesse dépressive portée sur la gnôle et les cachets n’avait rien à faire entre les mains d’un adolescent. Le site ActuaLitté révèle qu’il y est question d’une forme de « caution morale » de l’Éducation Nationale que ledit ado « comprendra comme une initiation sourde et malsaine« . Par où commencer ? Reconnaissons à SOS Éducation une manière de réalisme, puisque le même courrier envisage la possibilité que nos chères têtes blondes et boutonneuses ainsi exposées au vice imprimé soient déjà consommatrices de pornographie. Ouf. Disons que l’hypothèse n’est pas déraisonnable. On peut cependant estimer qu’un élève de lycée capable d’entamer la lecture d’un pavé de 528 pages sait à peu près en quoi consiste un putain de roman, en particulier ce qui le distingue d’un fascicule promotionnel. Sans compter que, comme l’a rappelé le ministère à ActuaLitté, les 2000 adolescents participant au Goncourt des lycéens font l’objet d’un accompagnement par le corps enseignant.
- Ajoutons sans trop divulgâcher que le sexe est justement représenté dans Le Club des enfants perdus dans toute sa complexité – et pas que mécanique -, puisqu’il peut y être joyeux ou triste, ciment d’un couple ou brève étreinte, satisfaisant ou frustrant, acte d’amour ou échappatoire, objet de fierté ou de regrets, etc. Après quoi un lectorat qui approche ou a atteint les 16 ans, soit l’âge légal du consentement, disposant donc a minima d’une vague idée de ce qui soulage les tiraillements du tutu ou du trilili, y trouvera autant matière à réflexion qu’à s’échauffer les sens, sinon bien plus. Remercions donc avant tout SOS Éducation, dont on ne se méprendra évidemment pas sur la pureté des intentions puisque sa déléguée générale et porte-parole a participé l’an dernier au colloque des Parents vigilants, collectif satellite du parti Reconquête : leur attitude sur le dossier illustre avant tout le propos même du roman dont il est question, à savoir la terrible incompréhension des jeunes par les vieux.
- Pas le plus menacé par la faillite à court terme, le géant américain de l’édition Penguin Random House a pourtant passé un cap dans les dispositions visant à se protéger des IA : ses directives de droits d’auteur précisent désormais qu’aucun nouveau titre ou réimpression ne saurait faire l’objet d’une utilisation dans le cadre de leur entraînement. Si le cadre législatif de certains de ses marchés, notamment l’Union Européenne, prévoit déjà une telle protection, c’est le premier éditeur à partager cette posture aussi explicitement. Prends ça, Skynet.
- Enfin Skynet continue malgré tout à grignoter la création artistique, notamment littéraire, si l’on en croit un projet tel que Rimbaud est vivant. Il s’agit d’un beau livre signé Luc Loiseaux, publié chez Gallimard et illustré par des photos d’époque… inspirées à une IA par les textes et la biographie de l’artiste. Si l’auteur est très clair sur le procédé utilisé et ses intentions, gageons que certaines de ces illustrations ne tarderont pas à circuler indépendamment du bouquin et être considérées comme authentiques par beaucoup. Ce fut déjà le cas l’an passé pour une première image de sa création présentée comme une photographie de 1873. Le point va à Skynet.
Le cinéma est mort, la preuve : il bouge encore (Guillaume) /
- Parlons cinéma, parlons de Clint Eastwood, cinéma en phonétique populaire depuis plus d’un demi-siècle. Quand bien même le sinistre patron de la Warner (sa maison depuis avant la naissance d’Antoine, rappelons-le) ne l’entendrait pas de cette oreille, l’âge plus que canonique du Clint n’est qu’un nombre et certainement pas un argument pour les spectateurs de 17 à 77 ans qui a répondu à l’appel des salles pour la sortie de son nouveau film sobrement intitulé Juré n°2. Travailler dans une exploitation cinématographique peut donner bien des raisons de déprécier le genre humain-qui-va-voir-que-des-films-de-merde-pour-se-gaver-de-sucre, mais génère occasionnellement des motifs d’espoirs qui permettent de racheter tout le reste. Et voir des lycéens faire la queue avec des retraités pour aller voir le nouveau film d’un cinéaste de 94 ans en fait partie.
- Mais trêve de préambule, le film. Juré n°2 raconte l’histoire de Justin, futur papa trop propre sur lui pour ne pas cacher des squelettes dans le placard, et juré dans un procès pour meurtre avec un coupable trop idéal pour faire valoir son innocence. Et pour cause : au cours du procès, Justin découvre qu’il a surement tué la victime, à cause d’un verre qu’il n’a pas bu et d’une pluie diluvienne qui l’empêchait de distinguer ce qu’il se passait derrière son pare-brise. Et maintenant que faire ? Si vous n’avez une réponse tranchée à cette question, alors le film est fait pour vous. Et si vous avez une réponse tranchée à cette question, le film a été fait pour vous.

- Il y a beaucoup moins de bonnes réponses que de choix compliqués dans la vie. Ça, Clint a eu le temps de le comprendre, et surtout de le filmer. 40 films d’hommes et femmes imparfaits au libre-arbitre otage d’un système profondément imparfait, d’icônes enchainées à leurs images et leurs fonctions, d’humains qui font ce qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont. Oui, c’est bateau et c’est sûrement trouvable dans le dossier de presse de 90% de la production artistique se targuant de scruter la condition HUMAINEUH. Mais Clint ne fait pas partie de la masse, il est dans la team des 1%.
- Ceux et celles qui ont atteint ce degré de conscience cinématographique supérieure où un plan en vaut cinq. Tout est là, présent, lisible et ressenti par le spectateur touché à l’os avec une économie de mouvements sans équivalents. Comme ces vieux maîtres de kung-fu qui atteignent les 8 points vitaux d’un seul coup de petit doigt, Clint atteint l’essence avec l’essentiel. Tout ce qui doit se trouver dans l’image y est, sans superflu aucun pour encombrer le chemin du spectateur vers l’évidence de l’instant. Ce n’est pas une démarche d’ascète, mais un partage de clairvoyance d’un artiste qui a eu le temps de dépasser le stade matériel de l’existence. Au fond Clint est éternel parce qu’il n’a pas besoin de mourir : il est déjà quelque part là-haut.
- Cette capacité à « voir » l’important – et surtout à le faire voir en cinéma – compte peut-être encore plus que d’habitude sur un projet comme Juré N°2, qui brasse autant de personnages que de thématiques que d’arcs narratifs. En d’autres mains, le scénario se serait probablement avéré trop dense pour son propre bien. Entre celles de Clint, on obtient un petit bijou d’écriture ciselée qui laisse une place à TOUT le monde sans perdre de vue le fil rouge de son récit. À savoir la crise de conscience du personnage de Nicolas Hoult, qui explose enfin comme le grand acteur qu’on le soupçonnait d’être. Grand poète du clair-obscur devant l’éternel, Clint trouve dans les yeux de Hoult une Joconde pour sa figure de style préférée. Même Tim Robbins, pourtant stellaire dans Mystic River, n’avait pas autant ouvert l’abime de l’existence sous les pieds du spectateur avec le regard découpé par un contraste expressionniste.
- Là-dessus et ailleurs, le Clint se révèle encore une fois comme le meilleur ambassadeur de son propre style. À tel point que Juré n°2 pourrait rouler sur du velours qu’on prendrait la route avec sans y réfléchir à deux fois. Mais le film offre bien plus au réalisateur que l’occasion de refaire du grand lui-même. Alors qu’on a pu lui reprocher (non sans raisons) de réchauffer l’assiette avec Cry Macho, Eastwood se met ici au service d’un projet qui a besoin de lui pour tailler les fougères et dégager le chemin le plus possible net au spectateur au cœur du récit. Autrement dit, c’est une grosse affaire de montage, et Clint en délivre première masterclass -à 94 ANS. Respect à Joel Cox, fidèle parmi les fidèles cinéastes, et à son fils ( ?) David pour le travail fourni. Leur art délicat de la synthèse permet au film attendu de se terminer une heure plus tôt que prévu pour s’aventurer dans l’inconnu.
- À l’instar du Robot Sauvage il y a deux semaines, Juré N°2 n’est ainsi contraint que par les besoins de ses personnages et le sens de l’histoire qu’il raconte, pas celles déjà racontées par d’autres. Une passionnante étude de caractères où ressortent toutes les nuances de la condition humaine au sein d’une Amérique polarisée comme jamais, évoquée ici avec un sens de la métonymie qui reste le privilège des grands classiques. Au sein d’un film de procès et débats ou chacun (se) juge par définition, Clint est le seul à ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. La démarche est assez formidable, si on excepte un ventre mou d’une vingtaine de minutes, et une fin ouverte qui résonne comme une facilité. Comme si Clint faisait malgré lui partie du jury et avait compromis sa vista dans les délibérations, et rendait son verdict par obligation plus que par conviction. Une destination bancale qui donne à la quête magnifique un arrière-goût d’inachevé. (Note d’Antoine : pas si ouverte, la fin, je dirais justement que le dernier plan suffit… on en cause quand tu veux.)

- Restons dans le Clint, son nouveau film, et les directions de studios teubés qui ne veulent plus s’emmerder à vendre autre chose que des modèles d’usine. Comme on l’avait mentionné il y a quelques semaines, Juré N°2 ne sort que dans une combinaison de 50 salles aux États-Unis, sans aucune intention manifeste de la part de Warner d’élargir ensuite le parc de salles. Et en outre, le studio a annoncé qu’il ne communiquerait pas sur le box-office du film. Ce qui est une façon de dire, de façon à peine détournée : « Ce film est une merde, on le sait, on ne sait pas quoi en faire », mais on lui ménage une sortie technique par charité pour le vieux avant son pot de départ qui n’arrivera pas, soit dit en passant. Clint a lui-même démenti le mythe du « 40ème film et bye bye », sur lequel la Warner s’est tant empressée d’insister. Et pour cause, on ne passe pas 9 décennies à atteindre la sagesse karmique pour rester fasciné par les chiffres ronds comme Tarantino. Clint ne compte plus les kilométrages sur le compteur, la charette s’arrêtera un jour au beau milieu de la route, et pas garée sur le bas-côté.
- Manifestement, le studio semble donc plus pressé de le voir partir en retraite que lui, ce qui expliquerait le traitement de Juré N°2, celui du canard boiteux que l’on autorise à taper dans le ballon à la mi-temps. Sauf que : le film récolte d’excellentes critiques – les meilleures pour Clint depuis un moment -, et le public répond présent sur une tranche d’âge qui fait le pont entre toutes les générations, sur le territoire U.S et mondial comme l’ont dévoilé les chiffres qui ont malgré tout fuité vendredi. Bref, ça sent le banger à oscars, sauf que comme l’explique l’excellent Bilge Ebiri sur Vulture, Eastwood n’est « pas un artiste à protéger, mais une anomalie à corriger ». Autrement dit : la Warner ne voulait pas anticiper l’échec de Juré N°2, mais l’empêcher de réussir. Clint est un bug dans la Matrice à fabriquer des franchises qui se ressemblent sur des propriétés intellectuelles onéreuses. Si Juré N°2 continue sur sa lancée, il y a fort à parier que David Voldemort Zaslav et ses potes en internes freinent la machine des quatre fers avant de rendre les armes devant l’évidence populaire. À 94 ans, still the people champ, et il met Hollywood au pied du mur : l’histoire est tellement belle qu’elle ne peut que s’écrire en lettres de réalité. La suite au prochain épisode.
- Autre grand empêcheur de tourner en rond, Robert Zemeckis ne récolte malheureusement pas le même soutien populaire que Clint Eastwood dans sa quête de cinéma hors des clous et des plans quinquennaux. Son dernier film Here, qui raconte l’histoire… d’une maison, depuis ses premières pierres jusqu’à son emménagement par un couple composé de Tom Hanks et Robin Wright, est sorti vendredi aux U.S. Après des premières projections-tests dithyrambiques, le film s’est fait démolir par les critiques et on espérait que le verdict des salles permettrait de rééquilibrer le karma en faveur de Bob. Mais les 5 millions générés en trois jours ont peu de chances de faire beaucoup de petits. Autrefois cinéaste en osmose avec le Zeitgeist, le Léonard de Vinci moderne (dixit le camarade Fouad Boudar) ne trouve plus le même écho qu’autrefois. Sa quête prométhéenne d’un cinéma s’écrivant en technologie pour élever les âmes et les consciences avec le médium ne semble soulever qu’une indifférence polie, au mieux. Dans la quête de contre-pouvoir, le classicisme d’un Clint Eastwood restera forcément un repère plus stable que l’avant-gardisme d’un Robert Zemeckis. Les temps sont durs pour les pionniers du médium.

Ce qui reste de la boxe anglaise (Antoine) /
- Histoire de ne pas mourir idiot, j’ai jeté un œil hier soir sur DAZN à la soirée du « BKFC » organisée à Newcastle. Il n’est nullement question ici de poulet frit mais de « Bare Knuckle Fighting Championship », autrement dit de la boxe anglaise sans les gants, ce que les amateurs du noble art sont fondés à considérer comme une régression – au moins depuis la publication des règles du Marquis de Queensberry en 1867. Nul ne sait si le service de streaming sportif britannique proposera dans quelques années le retour des combats entre des ours et des chrétiens, toujours est-il que le BKFC semble parti pour durer : créée en 2018 aux Etats-Unis, l’organisation en est à 104 événements tenus des deux côtés de l’Atlantique, et jusqu’à Pattaya – avec cette fois des règles dérivées de la boxe thaï. La mort d’un certain Justin Thornton en août 2021 après sa 5e défaite consécutive donna même l’occasion à Dana White de l’UFC d’y aller de son couplet moralisateur sur les dangers de ce – pas si – nouveau format.

- « There’s no bad advertising », serait-on tenté d’en conclure, vu le succès non démenti depuis du BKFC auprès d’un public que le risque de blessure ne rebute pas tout à fait… voire, motive plus que tout. À propos de publicité, les fondateurs de l’organisation – détenue par Triller Inc, à qui l’on dut la soirée surréaliste Jake Paul vs Ben Askren – eurent l’intuition assez géniale que la participation d’un boxeur reconnu légitimerait leur sport. Ils choisirent pour ce faire un type de 38 ans au punch inexistant et au thrash-talking légendaire, Paulie Malignaggi, dont la défaite par décision concédée à Artem Lobov (sur fond de rivalité avec un Conor McGregor toujours dans les bons coups) servirait désormais à désamorcer la moindre critique sur le niveau technique des combattants. Bien joué – et merci Paulie…
- Qu’ai-je donc vu, finalement, en une poignée de minutes passées devant le BKFC ? Grosso modo, ce que l’on peut contempler le samedi soir à la sortie du moindre pub d’un quartier chaud de ville moyenne en Angleterre ou en Floride, c’est à dire de la castagne. Ajoutons les efforts particuliers de mise en scène, du ring rond, parce qu’il faut bien se singulariser d’une façon ou d’une autre, dont la toile est frappée d’un immense logo OnlyFans (…), à la succession de combats prévus en 5 rounds de 2 minutes bien plus rapide qu’en boxe anglaise traditionnelle. Le MMA est passé par là. Les intentions sont claires, il s’agit ici de se démarquer au maximum d’un sport devenu trop peu lisible au regard des standards de l’époque, tout en conservant son élément le plus parlant : les deux types qui se cachoutent. Le moins de temps morts possible, donc, et du sang, beaucoup de sang, une promesse facilement tenue grâce à l’absence de gants. Le niveau technique qui en résulte varie de « cour d’école » à « sous-carte régionale »… sans qu’il soit besoin d’accabler les protagonistes, le système étant conçu pour mettre l’adversaire hors de combat plutôt que pour construire un succès aux points avec constance et application. Sur les 11 oppositions de la soirée, 7 se conclurent ainsi avant la limite. Ce que je conclus, moi, est que j’en ai eu ma dose.
- Pour reparler un peu de boxe et de victoires façonnées un round après l’autre, l’Américain O’Shaquie Foster a repris le titre WBC des super plume au Brésilien Robson Conceicao. Leur première confrontation de début juillet avait ennuyé ferme le public du Prudential Center de Newark (New Jersey), les juges choisissant de sanctionner par décision partagée l’attentisme du très élusif champion Foster bien qu’il ait semblé contrôler la plupart des rounds. Samedi soir au Turning Stone Resort & Casino (New York), l’ex-taulard choisit de s’engager plus franchement, et le combat qui en résulta ravit petits et grands. Entre deux adversaires très proches en valeur absolue, on assista à une succession de retournements de situation. Foster confirma qu’il démarre plus en diesel qu’en dragster, après quoi il trouva son rythme en multipliant les combos à la tête, mais le tenant du titre sembla trouver la solution derrière un jab autoritaire, éprouvant son challenger d’un méchant cross en début de 6e round. C’est alors que Conceicao sembla baisser en régime, s’accrochant de plus en plus alors que Foster gagnait en agressivité. On aurait pu croire le Brésilien condamné à rendre les armes, il vacilla même sur une droite plongeante en fin de 10e round, mais il sut composer avec des moyens réduits et offrir mieux qu’une digne résistance dans les championship rounds. La nouvelle décision partagée, cette fois en faveur de Foster, laisse augurer une belle entre les deux super plume. Espérons qu’elle ressemble plutôt à la revanche qu’au premier combat.
- Et puis on notera la défaite surprise du super coq anglais Liam Davies, certes déjà deux fois défait par son vainqueur du soir en amateurs, à la Resorts World Arena de Birmingham. À la puissance de Davies, Shabaz Masoud sut opposer son jeu de jambes et sa vitesse de poings. Il ne tape pas, c’est un fait (4 KOs sur désormais 14 succès en autant de combats), mais il parvint très tôt à dérégler la boxe d’un favori frustré et coupé sur un choc de têtes dès la deuxième reprise. Masoud vit à Stoke-on-Trent : les formidables fans de Nathan Heaney, dans l’hypothèse d’une retraite de celui-ci, tiennent peut-être son digne successeur…
- Un peu d’autopromotion pour finir : sur la chaîne Youtube du camarade Cap’taine Crochet, on est revenus sur la période de Juan « Baby Bull » Diaz, grand animateur des poids légers dans les années 2000 et protagoniste d’un combat d’anthologie face à notre Julien Lorcy national. À (re)découvrir absolument :
Le MMA va bien merci pour lui (Guillaume) /
- Il va si bien qu’il joue relâche cette semaine.