Punchlines du 19 novembre 2023

Le site (Antoine) /

  • Pas de Punchlines la semaine passée pour cause d’emplois du temps chargés, mais un nouveau papier à consulter, la recension du Sommeil de la raison de l’indispensable Gabrielle Wittkop, recueil de nouvelles à l’amoralité raffinée destinée aux lecteurs avertis.
  • Je n’exclus pas de publier le compte-rendu in extenso du Hellfest 2023 quand l’affiche de l’édition 2024 sera révélée, c’est à dire le mois prochain. Lillilol.
Hellfest 2023, une expression du bon goût.

Il est temps de réveiller la littérature (Antoine) /

  • Les vrais noceurs se la collent le lundi soir, c’est même à cela qu’on les reconnaît et l’organisation du Prix Wepler l’a bien compris, elle qui programma la remise de l’édition 2023 le 13 novembre dernier, dans la brasserie éponyme de la Place de Clichy. De discrètes touches de bohème rehaussaient les traditionnels uniformes germanopratins, on trouvait même quelques jeunes dans un coin de la salle. En chemisier brillant de mille feux, la pétulante libraire des Abbesses et fondatrice du prix Marie-Rose Guarnéri monta sur l’estrade pour signifier le début de la cérémonie. Puisqu’on était à Montmartre, terre d’artistes, il était bien naturel selon elle de commencer au son délicat des mélodies en guitare-voix de Malik Djoudi. L’artiste poitevin sembla abréger le second titre de son mini récital, le brouhaha ambiant s’accordant certes difficilement avec son art. Le patron de la brasserie, arborant l’épingle de cravate et le teint mordoré de rigueur, intervint pour remercier les partenaires de l’événement, dont deux ostréiculteurs jouant pour beaucoup dans son prestige auprès des pique-assiettes lettrés. Philippe Wahl, grand mécène du prix en tant que patron de La Poste, se fit étonnamment lyrique au moment de saluer l’hôtesse de la soirée, « être de lecture, si sagace ». Vint le moment de célébrer le jury hybride et tournant du prix, incluant une détenue, puis de saluer l’écrivaine-DJ aux platines et le postier de Montmartre prénommé Gilbert. Les jurés présents annoncèrent en musique la liste des douze titres retenus dans la sélection il me semble que Tumeur ou tutu de Léna Ghar reçut la plus belle salve d’applaudissements avant que fussent désignés les célébrés du jour, Elisa Shua Dusapin et Arthur Dreyfus. Venue de Suisse, la lauréate du prix pour Le vieil incendie, lumineuse et « fébrile », est une amatrice revendiquée du silence pour trouver ses mots. Elle a d’abord maitrisé le coréen, son œuvre erre en Asie, on y devine d’après son discours beaucoup d’intériorité et de délicatesse. Le français, elle l’aime tout en lui reprochant d’avoir supplanté les autres langues parmi ses moyens d’expression. Dreyfus, récompensé de la mention spéciale, est plus naturel dans l’exercice « Merci donc au jury pour son très bon goût… » lança-t-il avant de rendre hommage à Elisa Shua Dusapin. Il blagua avec aisance puis exposa son projet littéraire, sa prise en compte de la façon dont les guerres mondiales et le numérique ont cassé quelque chose de la fiction d’aujourd’hui. Il enchaîna références littéraires et mots choisis, palimpseste, syntagme, extrusion, imputrescible, etc. Le fil conducteur de cet « Elon Musk de l’écriture » était la Troisième main dont il est question dans son texte, lui permettant de rebondir de son homosexualité et la « monstruosité » à laquelle il se crut condamné aux événements pas si lointains d’un autre 13 novembre, « à choisir, il est toujours plus poli de se détruire soi-même ». On cria alors « silence » aux pipelettes du fond de la salle. L’auteur finit sur une pirouette, l’avis de recherche d’un parapluie oublié dans cette même brasserie quelques mois plus tôt. Il devrait être un pilier du microcosme qui l’honorait ce soir-là pour encore quelques décennies. Les allocutions finies, place à la fête et aux libations. La sono envoya des tubes eighties tandis que circulaient les petits fours, les huîtres promises arrivant un peu plus tard. Je me retrouvai à en cartonner le plateau le plus isolé aux côtés de plumitifs expérimentés, rompus à l’exercice, avant de tirer ma révérence au moment où ça guinchait vraiment. Les Sunlights des tropiques eurent raison de ma détermination de noceur du lundi soir.
Une guitare et deux voix.
  • Jouant relâche dimanche dernier, les Punchlines auront donc laissé passer le Goncourt, alors que le pronostic de rigueur publié ici n’était guère loin du compte : Neige Sinno, ou Jean-Baptiste Andrea si la première remportait le Fémina. Veiller sur elle aura donc décroché la timbale, succédant à Vivre vite de Brigitte Giraud. C’est le premier titre suprême obtenu par l’Iconoclaste, dont la fondatrice Sophie de Sivry est disparue cette année. Il est rigolo a posteriori de constater combien le choix de ce roman de facture classique aura irrité la chronique progressiste et branchée, des Inrocks à Télérama en passant par Transfuge. Mon commentaire favori reste le suivant : « toute la frange réactionnaire s’empare de ce roman au détriment de son auteur. Ils ne l’adulent que parce qu’une femme en face ne l’a pas eu. Quelle tristesse ». Encore un effort et nous serons enfin débarrassés de la moindre considération littéraire à l’heure de commenter le plus prestigieux des prix d’automne.
  • Disparu en 2014, André Blanchard a mené une carrière d’auteur bien éloignée des polémiques sur le Goncourt : l’œuvre qu’il nous a laissée est intégralement constituée de ses Carnets, publiés aujourd’hui en intégralité au Dilettante, dont une lecture d’extraits choisis accompagnée au piano était proposée ce vendredi à l’épicentre de Saint-Germain-des-Prés, le jazz-club Chez Papa. François Mardirossian, l’instrumentiste à l’œuvre, dit en introduction l’importance de Blanchard dans son existence ; il fut un collectionneur obsessionnel de ses écrits avant de rencontrer sa fille Pauline, avec qui il eut l’idée de cette lecture musicale après avoir écrit une pièce dédiée à l’écrivain. L’homme a la mèche romantique et l’intériorité extériorisée de l’emploi. « La musique que l’ai choisie, j’espère, ne fera pas ombrage à la musique de ses mots ». À vrai dire ladite sélection leur fit plutôt honneur, entre Satie, Chopin, Glass et Schubert. Pauline Kawa Blanchard, officiant au micro, rappela que « À la maison, on était quatre avec la littérature. Quand je suis née, en 1986, mes parents ont décidé que mon père s’adonnerait tout entier à la littérature ; ma mère était fonctionnaire de l’Éducation Nationale et pourvoirait à nos besoins, la contrepartie étant que mon père m’élèverait ». Les treize tomes des Carnets s’attardèrent sur la condition humaine, le spleen, la nature, les chats et les livres. « Même s’il avait un statut d’ermite mon père gardait un lien social en tant que veilleur d’un musée et grâce à son épouse K. (…) Il est mort très romanesquement » en ayant accumulé les succès critiques à défaut de séduire un public large, se refusant à la moindre promotion. J’étais probablement le benjamin de l’assistance à l’écoute des premiers mots de Blanchard, suivis des premiers accords choisis. « Si tout grand livre est un cimetière, c’est réciproque ». Le ton était donné, plus élégiaque et mélancolique qu’attendu c’est que le bonhomme était aussi connu pour sa causticité. Pendant la lecture, le lieu se rappela aux présents, comme animé d’une vie propre, tantôt par le ronronnement du percolateur, tantôt par le bruit du lave-vaisselle ; rien de plus légitime dans la pièce aveugle rappelant un ventre aux parois couvertes de graffiti. Dans la pénombre à l’odeur collante où du scotch rafistole pupitre et tabourets, les aphorismes s’enchaînèrent. « Aujourd’hui, devenir curé c’est couper à des tas d’emmerdes », « Le vrai progrès, maintenant, c’est de dire oui au monde », « Dieu, cette espèce d’anxiolytique toujours injoignable ». L’écriture se fit tantôt poétique, tantôt philosophique, la chronologie des extraits suivant le rythme des saisons. « Alors, me dit-elle, tu n’as rien à me raconter, tu gardes tout pour tes phrases ? » renvoya à la terrible condition de mineur de mots. « Solstice d’été, presque une nuit blanche pour le soleil » ravit par son évidente simplicité. Pauline scandait, debout, longue et très droite, déambulant puis s’immobilisant, les yeux sur son texte, les en levant les rares fois que le propos se faisait plus cinglant. « Les images en provenance du ciel sont à ce point belles qu’elles se passent d’être vraies » cita-t-elle à propos du catholicisme. Par jeu, Blanchard écrivit sa propre notice nécrologique. Lue sur la fin, elle évoquait les inspirations de Jules Renard pour le bucolique et de Léotaud pour le reste. Voilà qui donne envie d’en lire plus.
Mur de Chez Papa (détail, 2013)

Le cinéma est mort, la preuve : il bouge encore (Guillaume) /

  • Parlons… CINÉMA !!!  Oui, je sais, une seule rubrique vous manque, c’est tout un site qui est dépeuplé. Retenez vos larmes pour ne pas faire couler les miennes, je ne suis qu’un homme au service d’une noble cause dans une maison honorable. Sachez juste que l’absence de rubrique des salles obscures deux semaines durant ne fut pas le fruit d’une surprocrastination de la part de votre serviteur, mais de sa présence requise à l’édition 2023 de l’Arras Film Festival. Une bien belle manifestation pour un cru qui l’est tout autant. 10 jours de parenthèse enchantée pendant laquelle la vie et le cinéma se confondent à 200 à l’heure sans arrêts pipis sur l’autoroute du kiff. On y reviendra périodiquement à l’occasion des sorties salles de certains des films présentés, mais vous pouvez déjà vous en faire une petite idée avec ce modeste compte-rendu.
  • Grève des acteurs : clap de fin. Le retour du cinéma sur 130 livres.com s’effectue donc avec le tomber de rideau sur la grande saga qui nous a occupé cette présente année. Revalorisation de 8% du salaire minimum, création de nouveaux revenus résiduels propre aux plates-formes et leurs programmes à succès, garanties contre l’IA… La SAG-AFTRA (syndicat des acteurs) a toutes les raisons de présenter l’accord comme une victoire. Quasiment six mois de grève ont laissé ses troupes exsangues, et l’ultimatum lancé par le patronat hollywoodien il y a deux semaines réduisait la marge de manœuvre des saltimbanques à peau de chagrin.
  • Dans les faits, les choses sont encore un peu floues. Notamment en ce qui concerne la question de l’IA, désormais soumise au consentement en amont des principaux concernés… Ce qui veut tout, et rien dire à la fois. Appliquée au cas par cas, ça signifie que le choix laissé aux acteurs de refuser la clause IA devient un levier de pression en faveur des studios. Il y a celles et ceux qui travailleront et se laisseront scannés, et les autres qui paieront la monnaie de leurs principes en se battant pour un troisième rôle dans une sitcom de plate-forme… On le sait des deux côtés de l’Atlantique, une résolution non contraignante profite toujours au plus fort. À voir quel sera l’encadrement juridique de la chose. Pour l’heure, le texte doit encore être approuvé par le syndicat en interne… Wait and See.
« On a gagné »… le droit de recommencer ?
  • Quoiqu’il en soit, la fin de la grève ne signifie pas l’apaisement des hostilités pour autant. Le cabinet d’études Ender Analysis a passé au crible les comptes des studios hollywoodiens, et comme on pouvait s’y attendre, ça sent les problèmes. Entre Warner, Disney, Paramount, Comcast et Netflix, les moguls de l’usine à rêves cumuleraient ensemble… 190 milliards de dollars de dettes. À elle seule, la Warner aaffiche une ardoise de 43 milliards, malgré le carton de Barbie cet été. Bien entendu, les méandres financiers de ce genre de conglomérats sont plus retors que ces quelques lignes de profanes. On se gardera donc bien de compter l’hécatombe des franchises au box-office estival pour seule foreuse de l’égout financier dans lesquels barbotent les studios.
  • Reste qu’à défaut de bilans positifs à présenter, les majors annoncent des dégraissages de mammouths. Chez Disney, Bob Iger a annoncé 2 milliards d’économies supplémentaires sur les 5,5 déjà réalisés sur le dos du personnel et des projets en cours. Quant à Warner, David Zaslav a encore essayé de réaliser des économies de bout de chandelles en mettant au placard Coyote vs Acmé, un film consacré au célèbre personnage de cartoon crée par Chuck Jones, contre une ristourne d’impôts de 30 millions de dollars. Face à la bronca de l’équipe sur les réseaux, le studio s’apprêterait finalement à vendre le film à Amazon… Hollywood ressemble de plus en plus à la Grèce des années 2010 : une enseigne en liquidation judiciaire qui vend ses bijoux de famille à l’austérité.
  • Ridley Scott sort son Napoléon mercredi, et les premiers retours évoquent un conflit d’intérêt national. Aux États-Unis, l’approche démystificatrice du père Scott est acclamée, en France on lui reproche le traitement grossier d’une figure historique emblématique… Au vu de la dernière décennie de cinéma en toutes petites lettres du cinéaste, on serait tenté de se ranger du côté de nos compatriotes. N’y voyez aucune déférence chauviniste pour le personnage. Le taulier de ces pages se préoccupe bien plus de la prochaine échéance lensoise en ligue des champions que de l’intégrité du récit national (Antoine, corrige-moi si je me trompe) (Note d’Antoine : Non, tu ne trompes pas). Mais l’idée de voir Bonaparte se lancer à la conquête du monde pour compenser son impuissance érectile renvoie à la mesquinerie petit-bras avec laquelle Scott a traité tout ce qui s’approche d’une figure mythologique ces 10 dernières années…. À checker à partir de mercredi en salles, pour voir si Joaquin Phoenix nous fait une Colin Farrell sur Alexandre.
Le Périph’, ça devient vraiment n’importe quoi.
  • Sinon, vous pouvez vous caler un rendez-vous ciné VRAIMENT surprenant, frais et inventif avec Vincent doit mourir de Karim Leklou y joue Vincent donc, cadre de start-up esseulé qui commence à se faire frapper par… Tout le monde. Comme ça, sans aucunes raisons, sur le coup d’un vrillage inexplicable de ses bourreaux. Vincent se réfugie dans la campagne à l’écart du monde en flammes qui lui veut du mal, jusqu’à sa rencontre avec une serveuse qui ne s’incommode pas de sa présence… Indéniablement, le couple Karim Leklou / Vimala Pons constitue la force du film. Le premier par sa capacité à intérioriser le non-dit et à prendre des coups comme un personnage de Sam Raimi, et la seconde par l’évidence lunaire avec laquelle elle occupe l’angle mort d’un récit qui se perd parfois dans ses courants d’air. On peut ainsi reprocher son attentisme à Vincent doit mourir, qui dilue un peu l’énergie de son excellente entame avant de passer la troisième. Mais Stéphane Castang a la bonne idée d’émailler sa comédie romantique déguisée en film catastrophe en plaisirs de sales gosse communicatifs (dont une baston dans une fosse sceptique) et d’envies de cinéma qui payent leur grand écran. Il y a un cinéaste derrière la caméra, avec un esprit grivois et un cœur gros comme ça qui bat de concert avec son couple vedette. C’est pas souvent qu’on a vu des fins du monde aussi apaisés au cinéma. L’enfer c’est les autres, le paradis c’est un ou un(e). Idée ô combien séduisante à l’écran.

Ce qui reste de la boxe anglaise (Antoine) /

  • On parle rarement ici de championnats nationaux mais la tête d’affiche d’hier soir à la Manchester Arena mérite une exception : il s’agissait du duel entre David Bentley et Nathan Heaney pour le titre britannique des moyens. Bentley comptait 15 KOs sur ses 18 succès professionnels et le fait d’avoir tenu 12 rounds contre le Terminator de la catégorie, un certain Janibek Alimkanuly, donnait de solides garanties sur l’épaisseur de son menton. Autant dire qu’Heaney et ses 6 victoires en carrière avant la limite (17 en tout) ne partait pas tout à fait favori. Mais le natif de Stoke-on-Trent, fameuse pour ses céramiques et des hauts fourneaux désormais éteints, attire toujours dans son sillage pléthore de fans bruyants. Contrairement à un autre « Hitman » célèbre, Tommy Hearns, celui-ci peinerait à traverser du carton mouillé de ses poings gantés, mais il est réputé pour sa rigueur d’ascète et son infinie générosité entre 16 cordes, comme en témoigna sa double confrontation victorieuse avec Jack Flatley dans de sympathiques ambiances de pubs surchauffés. Porté par ses supporters, Heaney s’employa hier à dérégler la machine adverse, ne parvenant certes qu’à en érafler la carrosserie mais se montrant toujours le premier à déclencher, le tout en variant les déplacements pour priver Bentley d’une cible trop facile. Le bougre a souffert sur le ring, l’hémorragie nasale rougissant sa moustache de movember en témoigna, mais enfin sa victoire par décision à la majorité ne souffre aucune contestation. On vit rarement un boxeur aussi ému et heureux d’empocher une ceinture, quelle qu’elle soit : il se jeta littéralement au sol à l’annonce du verdict, avant de déplier une bannière à la gloire de sa ville. Nathan Heaney ne se méprend pas sur sa valeur et ses limites de pugiliste : à 34 ans, ce titre de Grande-Bretagne inespéré constitue « son championnat du monde à lui ». Reste que l’histoire est belle et qu’on se réjouit de voir à ce point transfiguré celui qui ne retint pas ses larmes à l’heure d’évoquer le suicide de son père, disparu en 2019. Les poids moyens de talent abondent en Angleterre, et sa première défense devrait déjà être un défi. On recommandera toutefois à son futur adversaire de venir aussi parfaitement préparé que lui : les Nathan Heaney de ce sport déplacent aussi facilement des montagnes que des autocars de lads qui les soutiendront jusqu’au bout.
Et Bentley sortit de route.
  • Également à l’affiche de la Manchester Arena, on notera le joli succès de Nick Ball sur le double challenger mondial des plumes Isaac Dogboe, sans réponse face à l’activité inlassable du prospect de Liverpool malgré un net avantage de punch, de taille et d’allonge. Le champion EBU des super coq Liam Davies mérite lui aussi une mention. Sa boxe en ligne disciplinée lui valut de triompher d’un autre invaincu, l’Italien Vincenzo La Femina, pourtant prompt à exploiter une rare erreur défensive en l’envoyant sur les fesses d’un crochet au 3e round… juste après avoir lui-même visité le tapis. Autant dire qu’on ne s’ennuya guère pendant les presque 5 rounds que dura le combat, achevé sur une ultime accélération de l’Anglais qui obligea l’arbitre à arrêter les frais. Davies méritera un jour sa chance mondiale… même si défier Naoya Inoue n’est pas la plus sécurisante des perspectives.
  • Neutralisation du Strip pour le Grand Prix de Las Vegas oblige, la soirée Top Rank de la semaine eut lieu jeudi soir dernier à la T-Mobile Arena. En tête d’affiche, Shakur Stevenson s’empara d’un titre mondial dans une troisième catégorie, celle des légers, après avoir vaincu par décision unanime Edwin de los Santos. Audibles dans les tribunes dès le premier round, les huées brocardant Stevenson sont toujours largement relayées via les réseaux sociaux, tant son attitude risquophobe a déplu. Boxant sur un coup, détalant à la moindre feinte adverse, l’Américain a donné l’impression d’être franchement terrifié par le punch du gaucher dominicain. Lui-même a reconnu que sa prestation laissait à désirer, et l’on s’interroge désormais sur le potentiel d’un boxeur que l’on voyait déjà atteindre le sommet du classement pound-for-pound. A-t-il été mis KO en sparring par Liam Para, comme le suggère une rumeur insistante ? Nourrit-il des doutes sur son menton ? Se situe-t-il simplement à opposé d’un Arturo Gatti lorsqu’il s’agit d’accepter de souffrir sur un ring ? Toujours est-il que le souvenir d’un stinker pareil mettra du temps à se dissiper, et qu’on regrette franchement le boxeur si brillant dans ses remises aperçu contre Oscar Valdez ou Robson Conceicao. Ce dernier commence d’ailleurs à se fabriquer un palmarès à la Serguey Dervyanchenko, souvent méritant mais jamais titré, et son duel avec Emmanuel Navarrete prévu en co-main event y aura contribué en se soldant par un nul. Le double champion mexicain au style si atypique des super plume dut son salut à deux knockdowns aux 4e et 7e round, tant le médaillé d’or brésilien de Rio le surpassa en activité et le trouva facilement en contre du droit. Un rematch devrait précéder tout superfight potentiel entre Navarrete et Stevenson.
  • Deux grosses affiches sont enfin finalisées chez les lourds, toutes deux prévues à Riyad : un empilement de stars et prospects remplacera l’unification des 4 titres majeurs détenus par Tyson Fury et Olexandr Usyk initialement prévue le 23 décembre prochain, tandis que l’Anglais et l’Ukrainien s’affronteront finalement le 17 février. Du bonheur au quintal ? Oui, mais… on en a parlé avec le Cap’tain Crochet.

Le MMA va bien, merci pour lui (Guillaume) /

  • Parlons MMA, disons quelques mots sur l’UFC qui s’est tenu la semaine passée au Madison Square Garden. Parce que ça fait longtemps que la rubrique a le rideau baissé, et parce que l’évènement en vaut franchement la peine. En vrac, et donc en quelques mots.
  • On commence par notre Benoit Saint-Denis national, dont la côte est littéralement en train d’exploser dans nos contrées et au-delà. La preuve : depuis que « BSD » a révélé que son cœur battait pour le RC Lens, Antoine songe très sérieusement à se faire tatouer God of War sur la fesse droite (la gauche étant occupée par un drapeau sang et or). Contre un profil de kamikaze similaire au sien en la personne de Matt Frevola, BSD a foncé comme à son habitude toute voile dehors, mais cette fois pas cravate sur la tête. Garde haute et la tentation du brawl sous baillon, le poulain de Daniel Woirin est resté assez méthodique face à un Frevola pas impressionné mais vite débordé. Quelques takedowns magistralement retournées par le Français et un high kick sur la tempe en sortie de clinch auront suffi à Saint-Denis funk funkyflesh pour clore le débat et grimper à la 11ème classe du classement des légers. En conférence de place, BSD a réclamé la ceinture BMF (Baddest Mother Fucker) à Justin Gaethje, actuellement détenteur de la breloque et auquel il promet un bain de sang. Au vu de sa courbe de progression exponentielle, le choc de 33 tonnes pourrait arriver plus vite que prévu. Toujours est-il que Benoit Saint-Denis offre une alternative bienvenue aux têtes d’affiche de l’octogone qui squattent les highlights par chez nous : le guerrier qui est là pour la guerre, et pour être simplement qui il est devant les caméras.
Quoi ma gueule, qu’est qu’elle a ma gueule ?!
  • Le forfait de Jon Jones contre Stipe Miocic avait jeté un froid sur la carte du MSG, qui se retrouvait sans duel de poids lourds à défendre. Ni une ni deux, l’UFC a appelé en short notice les deux étoiles montantes Tom Aspinall et Serguei Pavlovich, et mis en place un titre intérimaire pour combler l’absence sans doute prolongée de Jones. On s’attendait à un choc des styles et des volontés, ce fut une annihilation. Le britannique a littéralement aspiré Pavlovich sur son terrain de boxe anglaise avec un enchainement qui ne laissa aucun doute à l’arbitre. Contender malheureux l’an passé à cause d’une blessure au genou qui lui coûta un an d’éloignement de l’octogone, Aspinall vient de frapper un grand coup. Car à l’heure actuelle, on ne trouve pas dans la division un équivalent au jeu de jambes, à la mobilité du buste, et à la rapidité d’Aspinall. Pas même Cyril Gane, qui s’est d’ailleurs gentiment fait renvoyer dans les cordes après avoir interpellé le Briton sur Twitter, lequel n’a pas oublié s’être fait snobé par Bon Gamin à l’UFC Paris. Peu importe le titre : le roi, c’est lui désormais.
  • On termine avec ce qui se présentait comme le banger ultime sur le papier : Jiri Prochazka vs Alex Pereira pour le titre vacant des mi-lourds. A ma gauche, l’ancien champion de la catégorie, qui revenait aux affaires après une grave blessure à l’épaule. À ma droite, le nouveau venu de la division, poussé au titre après une victoire sans éclats sur Jan Blachowitz. L’homme le plus fou de l’UFC vs le plus dangereux, le samouraï tchèque qui avance le menton à la fenêtre contre le guerrier amazonien avec une scène de crime dans les poings. Au-delà de la guerre nucléaire annoncée, l’opposition de style suscitait donc un réel intérêt pugilistique. On se demandait si l’approche de Prochazka, qui fait feu de tout bois et des conventions, réussirait à ébranler le minimalisme stoïcien de Pereira. Au final, et sans être une déception, le combat s’est déroulé a minima. Après un round à se faire maltraiter les terminaisons nerveuses par les calf kicks de Pereira, Prochazka trouve ses marques, réussit à rentrer dans la garde de son adversaire et s’expose à un enchainement uppercut-crochet qui termine le débat. Arrêt un tantinet prématuré mais logique de l’arbitre, et accepté par un Prochazka beau perdant. Après la ceinture des poids moyens ravie éphémèrement à Izzy Adesanya, Pereira écrit l’Histoire en s’emparant d’une deuxième ceinture, oui mais. Car s’il a prouvé qu’il restait un des meilleurs strikers de l’UFC, force est de constater que le boogeyman des -84 kg fait pour l’instant moins peur chez les mecs qui taquinent le quintal. À voir et à confirmer, sans doute face à Jamahal Hill, autre roi de passage d’une division longtemps maudite qui retrouve enfin un peu de souffle.

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